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vendredi 2 septembre 2011

Déclaration du 16 Juin 1999 " Nous avons choisi l'espoir "

A quelques mois d'une échéance électorale qui sera cruciale pour l'avenir de notre pays, les Sénégalais sont plongés dans le doute. Jamais dans l'histoire de ce pays, les interrogations n'ont été aussi nombreuses sur tout ce qui touche à l'avenir et aux perspectives d'une nation qui, jusque là, avait su faire face à toutes les incertitudes politiques, économiques et sociales, quels qu'en fussent les causes, les manifestations et les effets. Les événements, parfois douloureux, survenus au cours des deux dernières décennies, ont montré que le peuple sénégalais, fidèle à son histoire, a, chaque fois, pris délibérément le parti de ne pas céder au découragement, de ne pa reculer devant l'adversité, de surmonter les épreuves et d'afficher une foi en Dieu et une fierté enracinées dans sa culture. Mais aujourd'hui, il faut convenir que les raisons d'espérer, qui étaient pour chaque Sénégalais une source significative de confiance en l'avenir, semblent inexorablement, se dérober de jour en jour. Après tant de promesses non tenues, tant de rendez-vous manqués, et tant d'occasions ratées, les Sénégalais en sont arrivés, hélas, à osciller devant l'impossible choix entre la résignation et la révolte. Jamais, sans doute, depuis 1960, le fossé n'a été aussi grand entre ceux qui sont censés assurer la direction du pays et nos populations.

Jamais, depuis l'indépendance, face aux espoirs légitimes d'une nation qui s'est voulue toujours plus unie et plus solidaire, alors que les gouvernants devaient avoir pour seule ambition de servir, le discrédit et la méfiance n'ont été aussi forts à l'égard des dirigeants. Et tout se passe comme si les Sénégalais désespéraient définitivement de leurs responsables et comme s'ils ne voyaient plus dans le jeu politique qu'une affaire d'ambitions personnelles et d'intérêts particuliers.

Là où, précisément, la recherche de l'intérêt général devait constituer l'unique finalité de l'action politique, I'on ne rencontre, le plus souvent, qu'une succession de manipulations d'appareils, que des démarches marquées du sceau d'un clientélisme archaïque et étriqué ou encore des luttes d'influence synonymes de courses acharnées et de dérives sapant, gravement, le moral des Sénégalais. Ces courses et ces dérives, érigées en système de gouvernement, ont débouché sur ce qui apparaît, à présent, dans notre pays, comme un affaissement de l'Etat et une dépréciation continue de son autorité quand celle-ci ne se manifeste pas par des réflexes de violence au détriment du citoyen. Et l'une des conséquences directes de cette situation se traduit par une perte progressive de la confiance du citoyen dans le pouvoir politique, attitude que les Sénégalais, de plus en plus, expriment ouvertement.

Des périls s'annoncent. Ils ne sont pas insurmontables. En effet, la situation qui prévaut en Casamance, depuis plus de seize années, appelle une solution politique - et non par les armes - qui se fonde sur un dialogue franc, direct et sincère, avec seule préoccupation les intérêts supérieurs de la nation, entre les autorités publiques du pays et les dirigeants du M.F.D.C. Aujourd'hui, de plus en plus, dans la région sud de notre pays, les populations souffrent atrocement des effets pervers et cumulés de cette situation, par des privations de toutes sortes, par la perte quotidienne de vies humaines, dans une atmosphère de grande insécurité, et par la destruction des infrastructures et des équipements de la région, le tout aggravant le marasme économique. Si cette situation en Casamance perdure, alors que les régions Est et Nord du Sénégal ont été récemment le théâtre de violences encore sporadiques certes, il est évident que la menace pesant sur l'unité nationale ainsi que sur l'intégrité territoriale du Sénégal continuera de constituer un obstacle majeur aux priorités d'un développement concerté dans la concorde et dans la solidarité, en bonne entente avec les pays voisins.

Par ailleurs et dans le domaine du développement et de la croissance du niveau de vie de nos compatriotes, qui peut, aujourd'hui, nier que le Sénégal se débat dans d'inextricables et tenaces difficultés ? Sous prétexte que le Sénégal est victime des retombées de la crise économique mondiale, la voie a été ouverte à tous les abus d'une gestion menée au jour le jour et rythmée au gré des aides fournies par la communauté internationale. Il en est résulté une absence totale de projet de société dans lequel le Sénégal puisse se reconnaître et identifier une alternative crédible et durable aux seules formules administrées par les Institutions multilatérales. Celles-ci, il est vrai, ont leur utilité, qui se situe dans l'accompagnement concerté des efforts de développement de chaque pays du Sud, et dans une expertise qui n'est plus à démontrer. Ces Institutions et notamment la Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International, sans oublier les Agences spécialisées des Nations-Unies, ont fourni la preuve de leur utilité. Elles continuent d'être utiles aujourd'hui mais il revient à chaque pays du Sud de concevoir, de conduire et d'assumer ses programmes et projets de développement.. Mais chaque pays - et le Sénégal ne peut faire exception - a l'obligation d'assumer l'essentiel de ses progrès économiques et sociaux, au profit de tous. L'aide ne fait pas le développement. Nulle part au monde, aucun pays ne s'est développé sur la base de l'aide.

Les Sénégalais ont pleinement conscience que l'avenir économique de leur pays et leur bien-être légitime sont à leur portée. Ils savent que, dans un monde où les enjeux de tous genres ont une dimension universelle, ils sont tenus de se soumettre à un certain nombre de contraintes: travailler eux-mêmes, plus et mieux, lutter contre la pauvreté en luttant contre la corruption, éradiquer les injustices, organiser, avec générosité, I'avenir de la jeunesse, choisir l'espoir en le cultivant par l'effort et par l'exemple, tolérer et accueillir les hôtes étrangers désireux de s'établir et de vivre avec nous, en bonne entente, dans notre pays, pour prendre une part active à notre développement. Mais les Sénégalais ne peuvent plus accepter que les sacrifices qui leur sont demandés soient inégalement répartis et qu'ils épargnent, comme c'est trop souvent le cas aujourd'hui, des privilégiés qui, à l'ombre de l'Etat et du pouvoir politique, se livrent à des pratiques malsaines d'enrichissement illicite, au détriment de la communauté nationale.

Devant ce constat d'irresponsabilité, qui menace l'existence même de l'Etat et l'esprit de solidarité, entre les Sénégalais, I'urgence est à un véritable sursaut qui redonnera ses lettres de noblesse à la politique et qui permettra à tous nos compatriotes d'être, après Dieu, enfin maîtres de leur propre destin. La route menant à un tel objectif est accessible pour peu que le peuple dise non aux artifices politiques et juridiques ainsi qu'à la prédation économique visant à pérenniser la main-mise de groupes d'intérêts mafieux sur le pays et à prolonger une gestion des ressources nationales dont la principale motivation est la protection exclusive de ces intérêts privés.

13 A l'aube du troisième millénaire, le défi auquel sont confrontés les Sénégalais et qu'ils doivent, par des voies qu'autorise la loi, relever, est celui de la reconquête de l'espace politique, en particulier par le suffrage transparent pour l'avènement d'une démocratie citoyenne. Ainsi, la longue et solide tradition de luttes politiques qui lui est reconnue va, à n'en pas douter, conduire le peuple à redonner tout son sens au suffrage universel et à retrouver sa liberté dans le choix de ses dirigeants. De l'issue de cette bataille de la liberté, que les démocrates sénégalais mènent, depuis longtemps, avec détermination et courage, dépendent la voie du progrès, celle de la défense et de la consolidation de notre démocratie nationale. Aujourd'hui, personne au Sénégal n'a le droit de se taire, malgré les menaces et les provocations.

La famille sénégalaise est menacée dans son identité, dans son statut, dans son avenir, dans ses rêves, dans sa vie. La jeunesse de notre pays vit une situation endémique d'inquiétudes profondes. La femme sénégalaise, mère, épouse, éducatrice, mérite que lui soit reconnue la place qui est la sienne, comme composante essentielle de la société. A cet effet, doit être conçue une véritable politique de la famille, qui élimine toute folklorisation politicienne, car la femme sénégalaise est parmi les principaux acteurs du développement, forte des valeurs qu'elle porte avec fierté. Qu'elle soit ménagère, vendeuse, analphabète ou intellectuelle, la Sénégalaise n'a jamais été aussi présente, dans ces moments de crise grave, par sa participation à tous les efforts entrepris en vue d'améliorer l'épanouissement de son cadre familial.

L'éducation et la formation ont été dévalorisées. L'Université sénégalaise, transformée en un ghetto qui produit des chômeurs, se trouve dans un état de décrépitude morale et physique avancé, avec des équipements obsolètes des effectifs pléthoriques, un personnel tant enseignant qu'administratif et technique à bout des sacrifices consentis pour sauvegarder un niveau et un prestige encore intact.

Dans le secteur de la santé, notamment l'accès aux soins, la protection maternelle et infantile, I'assistance aux personnes du troisième âge, le niveau de service offert a considérablement baissé en raison d'infrastructures mal entretenues, insuffisantes inégalement réparties et de l'insuffisance en personnel. Les coûts d'accès deviennent insupportables pour les populations obligées de plus en plus à se tourner vers la médecine traditionnelle.

Le monde rural attend depuis de longues années un possible accès à des techniques éprouvées en Asie et en Europe, qui le libère enfin d'une dépendance paupérisante et humiliante.

Que dire des artistes, des écrivains, et du monde du théâtre, sinon que les pouvoirs publics sénégalais doivent réhabiliter, par des moyens adéquats, la vocation de notre pays comme foyer de référence dans le domaine de la création culturelle et artistique.

Par ailleurs, devant l'opacité qui s'offre à eux quant à une promotion sociale dans leur pays, par le travail et par le seul mérite, des milliers de Sénégalais ont dû se résoudre à l'exil. A l'étranger où ils se trouvent, ils suent sang et eau pour nourrir et soigner leurs familles restées au Sénégal, payant le prix fort de la dignité et de l'honneur. Qui aujourd'hui, parmi nos dirigeants, pense à ces Sénégalais de l'extérieur avec sérieux et avec générosité ? Ne jouent-ils pas, ces Sénégalais, mois après mois, par les fonds qu'ils envoient régulièrement au Sénégal, un rôle économique et financier qui représente une part importante dans les équilibres intérieurs, dans la stabilité des familles et dans l'urbanisation des campagnes.

Combien de cadres sénégalais, diplômés des universités et grandes écoles du Sénégal ou d'ailleurs, ont-ils choisi de demeurer aux Etats-Unis, au Canada, en Europe et dans d'autres pays africains, à cause d'une politique erratique de gestion des ressources humaines dans leur propre pays, où la médiocrité politisée est préférée à la compétence technique et à l'efficacité.

Ici, dans notre pays, et pendant ce temps, le système démocratique sénégalais est menacé par les manipulations répétées de la Constitution et des Institutions de la République. Celles-ci sont remises en cause de façon unilatérale, à la faveur d'une majorité qui n'hésite plus à travestir les fondements de la démocratie parlementaire, dans l'unique but de satisfaire une boulimie d'avantages sans commune mesure avec les ressources nationales. Ainsi, après les changements opérés récemment, écartant la limitation des mandats présidentiels et modifiant le pourcentage minimum requis pour l'élection du premier magistrat de la nation au premier tour, les Sénégalais sont, encore aujourd'hui, confrontés au problème du fonctionnement de l'ONEL et de la désignation de son Président. Il demeure évident que le Président de l'ONEL ne peut être crédible que s'il est désigné conformément à la loi sans quoi la neutralité positive de cet organe est gravement compromise. En outre, cette désignation doit être consensuelle et recueillir l'agrément de tous les acteurs politiques. Aussi. changer le Sénégal devient un impératif absolu.

Il n'est pas possible de promouvoir une économie viable sans un allègement contrôlé de la fiscalité qui pèse sur les ménages, les travailleurs et sur les entreprises en un mot sur les secteurs de production des biens, des services du développement. Encourager l'investissement par une protection contre toute forme d'abus devrait aussi être une priorité en direction des nationaux comme des investisseurs étrangers.

Il doit être mis fin, rapidement, à la patrimonialisation de l'Etat, du bien public, et à la recherche effrénée de prébendes. Des réformes doivent intervenir dans la conception, dans l'organisation et dans le fonctionnement des Institutions de la République, dont l'indépendance des unes vis à vis des autres doit être effective pour une bonne administration du droit et de la loi.

Le mandat présidentiel doit être constitutionnellement limité à deux termes et non pour des périodes de sept ans mais bien de cinq ans au maximum. Il est évident et aujourd'hui amplement prouvé que ce qu'un Chef d'Etat n'a pu réaliser en dix ans, il ne pourra jamais le réaliser en vingt ou trente ans.

Depuis plusieurs mois, je reçois, nombre de mes compatriotes, de tous âges et de toutes conditions, des appels que je perçois comme la marque d'un désarroi en même temps qu'une manifestation de confiance vis-à-vis de tous les Sénégalais qui sont considérés comme pouvant, dans les circonstances actuelles, être utiles à leur pays. Pour ma part, avec l'aide de Dieu, dès lors que seront accomplies, dans les semaines à venir, les mesures légales que j'ai commencé de mettre en œuvre, depuis plusieurs mois et avec nombre de mes compatriotes, je suis prêt à donner au combat politique que je poursuis depuis toujours une nouvelle dimension, des moyens nouveaux et une finalité nationale pour la promotion d'un Sénégal dirigé autrement, pour l'idéal de liberté dont notre pays, aujourd'hui, a si intensément besoin.

A mes parents, à mes amis, aux personnes qui me sont chères, je laisse l'entière liberté de choisir, en toute conscience, face à cette décision. Parce que je leur reconnais la libre pratique de leurs droits de citoyen, le droit de m'accompagner dans mon combat ou celui d'évoluer dans un autre cadre. J'invite à me rejoindre, dans ce combat, tous ceux et toutes celles qui considèrent que les Sénégalais, s'ils ne peuvent pas changer de pays, ont le devoir et la possibilité de changer leur pays.

Le lieu focal de notre réflexion et la finalité de nos efforts, au moment où nous décidons de nous engager dans la voie choisie, doivent se situer dans la priorité à attribuer à tout ce qui concerne le présent et l'avenir de la famille, de la femme sénégalaise, de la jeunesse, des chômeurs et des victimes de l'exclusion, de l'éducation, de la santé, des personnes du troisième âge, des personnes sans emploi et de la promotion d'une université nationale dont le prestige est encore aujourd'hui intact mais qui ne bénéficie ni du traitement ni des moyens si indispensables à sa mission. Le monde rural, le monde du travail, le secteur privé, le milieu productif des agglomérations urbaines, les acteurs et créateurs du monde de la culture et des arts méritent dans cet élan une attention qui soit à la mesure du rôle qui leur est dévolu dans une société en pleine mutation au moment où le Sénégal, hier cité en exemple, traîne aujourd'hui au dernier rang.

Aujourd'hui, aucun homme, seul, ni aucun parti politique ne sauraient se vanter de pouvoir relever, de manière exclusive, tous les défis qui nous interpellent. Ce n'est qu'unis dans la diversité et dans le libre choix des programmes de redressement, que les Sénégalais parviendront à faire face à la situation.

J'ai servi mon pays, avec disponibilité, du mieux que j'ai pu et jusqu'à la limite des conditions dans lesquelles j'ai exercé les responsabilités et assumé les charges que j'ai occupées. Je sais que d'autres Sénégalais, avant ou en même temps que moi ont servi avec le même dévouement. Ia cause de notre pays. Demain, d'autres le feront.

J'ai toujours refusé de m'inscrire dans la dynamique d'un dauphinat, pour remplacer qui que ce soit, à la faveur de mécanismes qui se situent toujours en dehors de la moraie et de l'éthique démocratique. Les peuples sont seuls habilités à choisir leurs dirigeants conformément à la volonté divine et au droit.

J'ai toujours considéré que toute forme de succession à la tête de l'Etat, qui excluerait, directement ou indirectement. les procédures du suffrage universel, est totalement condamnable. Le jour où les Sénégalais et leurs dirigeants auront, ensemble, des destins croisés, le pays sera sauvé.

Il y a un temps pour tout: un temps pour la réflexion, un temps pour le travail. En m'écartant de mon propre gré des organes du pouvoir, il y a quelque temps, j'ai voulu poursuivre une réflexion, bâtir une analyse, pour voir venir le temps de la reconstruction. Arrivent le temps de l'espoir, le temps de l'union pour la reconstruction, le temps de la compréhension et de la volonté, pour un " Sénégal autrement ". Le Sénégal ne peut vivre qu'avec la liberté de créer. Il ne peut créer son destin que dans la liberté. Une renaissance est nécessaire. L'Etat de droit, celui du respect de tous les droits, porte l'espoir des Sénégalais. Pourquoi ne pas le choisir ?

Je ne regrette rien. J'ai servi avec loyauté, avec fierté. Je ne renie rien de ce passé que j'ai choisi et que j'assume pleinement. Aujourd'hui je suis décidé à m'engager avec la même volonté et la même détermination, à me mettre à la disposition de mon pays. Ce faisant, je reste. avec humilité. au service de Dieu, de mon pays, de mes concitoyens sénégalais. Le monde évolue et avec lui le Sénégal. Des ruptures sont parfois nécessaires quand vient le temps du destin. Je suis prêt. Je les accepte. Pour toutes ces raisons, la voie dans laquelle j'ai décidé de m'engager dans les semaines à venir s'inscrit dans la durée et se situe au niveau le plus élevé du sacrifice pour l'intérêt de tout un peuple pour les échéances immédiates et les échéances à venir. Pour le Sénégal et pour les Sénégalais, dans une Afrique ouverte sur le monde.

mardi 23 août 2011

PR BABACAR GUEYE, REDACTEUR DE LA CONSTITUTION SENEGALAISE DE 2001 : "Wade a épuisé ses mandats"


23-08-2011


Le Pr Babacar Guèye, un des rédacteurs de la Constitution de 2001, rompt le silence en ce mois béni de ramadan pour édifier les Sénégalais sur les tenants et les aboutissants de la nouvelle loi fondamentale et sur la candidature de Me Wade. Son intime conviction est que Wade est disqualifié pour la Présidentielle de 2012.
M. Guèye, dans quelles circonstances la Constitution de 2001 a été mise en place ?

Cette Constitution a été élaborée à la suite de la victoire de Wade le 19 mars 2000. Comme c’était une promesse électorale que de procéder à la refonte de la Constitution après sa victoire, il a tenu parole en mettant en place une commission, à la tête de laquelle se trouvait à l’époque Mme le ministre de la Justice Mame Madior Boye, qui est devenue par la suite Premier ministre. Et j’avais été contacté au même titre que mon collègue Pape Demba Sy, Me Ismaïla Ka, et d’autres personnalités, pour faire partie de cette commission de rédaction de la nouvelle Constitution. Avec l’ambiance euphorique d’après-alternance, nous avions participé de tout cœur à la rédaction de cette Constitution.

Comment se passaient les travaux ?

Les travaux se déroulaient dans le bureau de Mme le ministre. Il y avait une grande table et nous étions tous assis autour de celle-ci. Nous avions dans un premier temps commencé par discuter du contenu de la Constitution. Evidemment, nous avions reçu des termes de référence du Président Wade. Dans les termes de référence, il disait qu’il souhaitait continuer à définir les politiques de la nation et en même temps, il souhaitait que le Premier ministre ait plus de pouvoir que dans la précédente Constitution. Nous avions commencé par définir les grands axes, les points sur lesquels nous devions apporter des changements, les problèmes des ruptures. Et une fois que nous avons fait ce travail préparatoire, moi-même, mon collègue Pape Demba Sy, Ismaïla Ka, nous avions été chargés de rédiger un premier draft de ce qui allait être la nouvelle Constitution. C’est en particulier Pape Demba Sy et moi-même qui avions rédigé le premier draft. Ensuite, nous l’avons soumis à Me Ismaïla Ka, pour qu’il le valide. Ensuite, nous avons présenté ce travail-là en commission, puis nous avons continué à revoir article par article. Tous les membres de la commission ont participé activement à l’élaboration de la Constitution. De l’autre côté, le président de la République avait autour de lui son équipe. Il nous arrivait d’envoyer une partie du document à la Présidence et de le recevoir avec quelques modifications.

Comment sont venus les articles 27 et 104 de la Constitution qui soulèvent aujourd’hui une polémique ?

Tout est partie d’une discussion que nous avons eue sur la durée du bail du président de la République à la tête de l’Etat. Nous sortions du pouvoir socialiste exercé par le Président Diouf pendant 19 ans. Avant lui, le Président Senghor avait exercé le pouvoir pendant 20 ans. Et la réflexion que nous faisions était de dire que 20 ou 19 ans au pouvoir, c’est beaucoup trop long. Parce que plus on reste au pouvoir, plus on a tendance à personnaliser le pouvoir, à se concevoir non pas comme le mandataire de ce pouvoir, mais comme le propriétaire de ce pouvoir. A la longue, le pouvoir de commander les autres devient un droit et cesse d’être une fonction. On a senti le glissement de la perversion du pouvoir. C’est ça qui nous avait poussé à dire qu’il ne faudrait pas un président de la République qui reste plus de dix ans à la tête de l’Etat. C’est pour cela que nous avons choisi cinq ans. Parce qu’à l’époque, la Constitution avait porté la durée à 7 ans. On l’a ramenée à 5 ans, en nous disant que 2 fois 5 ans, c’est largement suffisant pour le président de la République.

Dans quel état d’esprit était le président de la République Abdoulaye Wade A ce moment ?

Le Président Wade avait accepté cette proposition. Mais en même temps, on s’est dit en commission que le président a commencé son mandat sous l’emprise de la Constitution de 1963. Et nous nous sommes dit que ce n’est vraiment pas juste de le priver d’un mandat de sept ans. Alors, on s’est dit : il faut qu’il ait la possibilité de faire ses 7 ans, et après ce mandat, il ne pourra exercer qu’un mandat de cinq ans. C’est ce qui explique la rédaction de l’article 104. Dont le premier alinéa dit que le président en exercice poursuit son mandat jusqu’à son terme. Là, c’est la durée qui est mis en exergue. Deuxième alinéa, toutes les autres dispositions de la Constitution lui sont applicables. Cela veut dire que l’article 27, alinéa premier, ne lui est pas applicable. Puisque cet article prévoyait que le mandat serait de cinq ans. La Constitution de 2001 accorde une dérogation au Président Wade, qui pouvait ainsi exercer un mandat de 7 ans. Mais immédiatement après toutes les dispositions lui sont applicables. C’est-à-dire en particulier l’alinéa 2 de l’article 27 qui dit que le mandat est renouvelable qu’une seule fois.

Est-ce que vous pensez qu’il a épuisé les mandats ?

Absolument ! Il a épuisé les mandats. Le premier mandat, c’était celui qui a commencé en 2000. Et que la Constitution de 2001 a pris en charge dans le cadre de l’article 104. Le deuxième mandat, c’est celui qu’il a commencé en 2007, et qui va se terminer en 2012. En 2012, il aura fait ses deux mandats successifs et ne pourra pas se présenter à une autre élection présidentielle, avant peut-être 2019.

Certains lui disent que le mandat de 7 ans de la Constitution de 1963 ne lui est pas applicable ; qu’en pensez-vous ?

S’il ne lui était pas applicable, nous n’aurions pas introduit l’article 104. Quel intérêt aurions-nous d’ajouter cet article 104 dans les dispositions transitoires si ce premier mandat de sept ans était exclu du nombre des mandats ? Justement parce que nous avions bel et bien l’intention de prendre en compte ce mandat de 7 ans par la nouvelle Constitution que nous avons ajouté l’article 104. Il assure une sorte de pont entre l’ancienne et la nouvelle Constitution. C’est pourquoi ceux qui parlent de rétroactivité se trompent. Il n’est pas question dans cette nouvelle Constitution de rétroactivité. On ne traite pas de rétroactivité. Il est plutôt question de succession de deux Constitutions dans le temps. Certains diront un conflit entre deux lois.

Est-ce que le Président Wade l’avait compris ainsi ?

Absolument, c’est comme ça qu’il a compris puisque c’est ce qu’il a expliqué en 2007, lorsqu’on lui a posé la question de savoir s’il allait briguer un autre mandat. Il a répondu clairement qu’il ne pouvait pas briguer un autre mandat en 2012, puisqu’il avait verrouillé la Constitution, en limitant le nombre de mandats à deux successivement. Il a déjà fait ses deux mandats successifs. Je pense qu’il ne peut plus se représenter à une élection présidentielle, si ce n’est en 2019.

Et si le Conseil constitutionnel valide la candidature de Wade ?

Je ne vois pas sur quelle disposition le Conseil constitutionnel pourrait s’appuyer pour valider sa candidature. Pour invalider sa candidature, c’est très facile. Une lecture combinée des deux articles 27 et 104 permet de voir très clairement qu’il ne peut pas se représenter pour un troisième mandat. Je ne vois pas comment le Conseil constitutionnel peut valider la candidature de Wade.

Que répondez-vous à ceux qui disent que le rôle du Conseil constitutionnel se limite à voir si les dispositions pour déposer une candidature sont respectées et non pour valider ou invalider une candidature ?

C’est vraiment ne pas vouer un grand respect au Conseil constitutionnel que de vouloir réduire sa fonction à celle d’un greffier. En tant que premier gardien de la Constitution, en tant que garant du respect de la Constitution et de l’Etat de droit, il est obligé de déclarer la validité des candidatures. Il est obligé de prendre une décision. Par conséquent, il est obligé d’examiner la validité de ces candidatures. D’ailleurs, l’article 116 du Code électoral dit clairement que pour s’assurer de la validité des candidatures déposées et du consentement des candidats, le Conseil constitutionnel fait procéder à toute vérification qu’il juge utile. Il n’est limité par aucun texte. Ceux qui disent le contraire se réfèrent à l’article 2 du Code (électoral) qui organise le Conseil constitutionnel. Mais l’article 116 fait obligation au Conseil constitutionnel de vérifier la validité des candidatures. Par conséquent, je ne vois pas comment le Conseil constitutionnel peut se déclarer incompétent. Et si par extraordinaire il se déclarait incompétent, il y a l’article 118 du Code électoral qui dispose que le droit de réclamation sur la liste des candidats est ouvert à tout candidat. Donc un autre candidat peut contester la validité de la candidature de Me Wade, s’il venait à se présenter. Le cas échéant, le Conseil constitutionnel serait obligé de statuer parce que cet autre candidat, en contestant la recevabilité de la candidature du Président, reconnaît certainement l’article 27 et l’article 104. Et le Conseil constitutionnel sera bien obligé de se présenter. Je pense qu’il n’est pas possible que le Conseil constitutionnel ne se prononce pas. Ceux qui le disent se trompent.

Il semble y avoir un flou entre les mandats de Wade et leur renouvellement ?
Il faut faire la distinction entre trois choses. Le mandat, la durée du mandat et le renouvellement du mandat. L’article 27 alinéa premier traite du mandat qui peut varier. L’article 27 alinéa deuxième traite du renouvellement du mandat, qui dit que le mandat du président de la République est renouvelable qu’une seule fois. Donc il y a une distinction nette qui est faite entre le mandat lui-même et son renouvellement. Donc il n’y a pas de problème du mandat. L’alinéa premier de l’article 27 ne lui a pas été appliqué, parce que, dans la première mouture, il disait que le mandat est de cinq ans, et par la suite le mandat a été porté à sept ans, mais qu’à cela ne tienne. Ça ne change pas le fond de l’article 27, notamment l’alinéa deux qui reste inchangé. Le premier mandat a été celui de 2000, en 2007 il a été renouvelé, c’est terminé. Il ne peut pas être candidat.

Pourquoi le Conseil constitutionnel ne saisit pas le dossier dès à présent ?

Malheureusement, il n’y a pas de base légale pour que le Conseil constitutionnel se saisisse de cette affaire avant la date.

Même avec des réformes constitutionnelles ?

Il peut y avoir des réformes constitutionnelles, mais à condition qu’elles soient consensuelles. Il ne faut pas oublier qu’on est à six mois de l’élection présidentielle. Et le protocole de la Cedeao prescrit qu’à moins de 6 mois des élections, on ne peut pas modifier les règles du jeu, sauf de manière consensuelle. Mais je pense qu’il y a plus simple. Le président de la République, s’il veut vraiment éviter des troubles au pays, s’il veut vraiment que la paix continue de régner au Sénégal, s’il veut que le Sénégal continue de faire figure d’exception en Afrique de l’Ouest, parce que c’est le seul pays qui n’a pas été secoué par des troubles, tous les autres pays (de la sous-région) ont été secoués par des troubles, il peut retirer sa candidature qui n’est pas conforme à la Constitution. Le syndrome de la Côte d’Ivoire plane sur nos têtes et je pense que pour l’éviter, il peut retirer sa candidature.

Pourquoi avoir gardé le silence jusqu’ici ?

Il y a eu des initiatives pour restaurer le dialogue entre le pouvoir et l’opposition. Et je voulais donner la chance à ce dialogue. Et je pensais que, par le dialogue, on arriverait à surmonter toutes les difficultés que nous connaissons actuellement. C’est la raison pour laquelle je me suis tu. A plusieurs reprises, j’ai été interpellé par les journalistes et j’ai refusé de répondre, parce que je voulais donner la chance au dialogue et j’étais souvent désigné pour participer à la réalisation de ce dialogue. Donc, je ne pouvais pas être juge et partie en même temps. Aujourd’hui, à moins de six mois de l’élection, le dialogue est dans l’impasse et je ne pense pas qu’il puisse redémarrer. C’est pourquoi j’ai considéré que j’avais un devoir de vérité à l’égard des Sénégalais, à l’égard de mes concitoyens parce que j’ai participé à l’élaboration de la Constitution et je me devais de faire ces témoignages pour dire ce qui s’est réellement passé. J’ai choisi ce mois béni du ramadan, pour mettre en exergue le caractère authentique de ce que je vous ai dit.

Alassane Samba DIOP (Rfm)

jeudi 16 juin 2011

Moustapha Niasse : « Wade sait dans quelles conditions ont été trafiquées les phases successives du scrutin de 2007 »

Wade sait très bien, et dans tous les cas mieux que quiconque, comment et dans quelles conditions, ont été trafiquées les phases successives du scrutin de 2007, jusqu’au mode de comptabilisation et de proclamation des résultats, a estimé le secrétaire de l’Afp lors de la Conférence nationale du Mouvement des Jeunes de son parti à Fatick. Lire son discours



Conférence nationale du Mouvement des Jeunes de l’AFP

Fatick, le 12 mars 2011

Allocution – Message de M. Moustapha Niasse

Secrétaire Général du parti

Mes chers Camarades,

Vous êtes aujourd’hui à Fatick réunis, à l’occasion de la 2ème Conférence nationale de votre Mouvement.

Nous voulons vous remercier, solennellement, de nous avoir invités à votre Conférence dont la pertinence du thème central est frappante : « 2012 : libérer le peuple sénégalais et réhabiliter l’espoir ».

Les populations du Sine vous accueillent, dans un contexte particulier marqué par la mobilisation de tous les patriotes de notre pays, décidés plus que jamais à accompagner solidairement le peuple dans sa quête exigeante de progrès, parce que conscients que c’est dans l’effort soutenu par l’esprit de méthode que l’homme réalise ses ambitions vers un plus-être et un mieux-être que son génie lui permet de construire, étape après étape, sur le long et exaltant chemin de son destin.

Dans le combat national qui s’organise ainsi, l’AFP, notre parti, s’est engagée, avec vigueur et avec rigueur, au service de la vérité et du changement, dans la pleine ambition de contribuer légitimement et activement à l’avènement d’un Sénégal nouveau.

Après dix années de politiques publiques entreprises dans un cadre et avec des moyens erratiques, hasardeux, approximatifs et dangereux, le pouvoir en place a conduit les Sénégalais à considérer qu’il est de leur devoir impérieux de mettre le holà au régime libéral de Me Wade.

Ce devoir impérieux, nous devons l’accomplir, tous ensemble, en février 2012. La jeunesse de notre pays en général, la jeunesse de l’AFP et de Bennoo Siggil Senegaal en particulier, ont une place singulière dans ce combat.

En décembre 1694, Fénelon interpellait le Roi Louis XIV en ces termes : « Sire, votre pays se détruit du dedans, inexorablement. Son agriculture se meurt, ses paysans subissent la faim, la maladie et les privations. Vous conduisez le peuple, les yeux bandés, insensible comme vous l’êtes, vers l’abîme ».

Quelle actualité peut être aussi réelle qu’au Sénégal d’aujourd’hui, pays dirigé dans l’aveuglement et dans l’irresponsabilité !

Mais nous refusons d’être conduits à l’abîme.

Ce refus, nous devons le traduire par la détermination dans la persévérance et l’engagement dans le combat contre les injustices, par notre opposition contre la mal gouvernance, le gaspillage des ressources publiques, la corruption au sommet de l’Etat, le laisser-aller dans l’administration du pays, contre l’imprévoyance et l’incompétence, contre l’absence de vision et contre le manque de générosité de la part de ceux qui nous dirigent et qui détruisent, par pans entiers, notre pays, son économie, sa jeunesse, son patrimoine national, ses cultures, ses valeurs et vertus. Et qui, aussi, ont fait perdre au Sénégal sa crédibilité dans le monde.

Dans ce combat, les jeunesses de notre pays, encore une fois, occupent une place singulière, toute chargée d’enthousiasme conscient et de patriotisme en mouvement, à la faveur des forces dynamiques que recèlent les populations de notre pays, dans les campagnes comme dans les villes, aptes à relever le défi de l’amour du pays nourri à la source inépuisable des valeurs de notre société et dans l’enrichissement continu de la culture sénégalaise servant de terreau fertile aux composantes successives de la révolution qui se prépare. Le mot révolution est ici entendu comme la mobilisation du peuple pour exiger, dans la perspective des prochaines échéances électorales de février 2012 et au delà, le respect de la loi et du droit, la transparence et l’objectivité dans la conduite du processus électoral, l’évitement, sous contrôle contradictoire, des mécanismes de la fraude que mettent en place, à différents niveaux, les spécialistes zélés qui ont piraté et falsifié, lors de la présidentielle de 20O7, les vrais résultats du scrutin.

M. Abdoulaye Wade sait très bien, et dans tous les cas mieux que quiconque, comment et dans quelles conditions, ont été trafiquées les phases successives du scrutin de février 2007, jusqu’au mode de comptabilisation et de proclamation des résultats.

L’histoire jugera.

Cette révolution est devenue inéluctable parce qu’elle porte les germes généreux du changement, changement dans les mentalités, changement dans les comportements, changement dans les attitudes de chacun, changement dans la perception, dans la compréhension et dans l’analyse des phénomènes de notre société, pour porter en triomphe des ambitions partagées et un nouveau mode de développement communautaire qui allie, tout à la fois, les exigences de l’éthique républicaine, le pragmatisme des réalités de notre temps et les aspirations légitimes du peuple vers la démocratie et le développement, au sein d’une société sénégalaise libérée, définitivement, des serres acérés des carnassiers qui boivent le sang du peuple, avec mépris et insouciance.

Dans le canevas mouvant et multisectoriel à l’interne qui servira de cadre à cette révolution, les jeunes de l’AFP, nous le savons, se sont déjà préparés avec lucidité pour se tenir la main, marcher ensemble dans la même direction et maintenir haut le flambeau de la reconquête des vertus de dignité, d’honneur et de sacrifice que nous ont légués nos communs et valeureux ancêtres.

Evoquer, avec émotion, ces vertus de courage et cette capacité immense de sacrifices dans un élan historique de noblesse et de grandeur, ici au cœur du Sine, c’est rendre hommage à tous ces preux, à ces guerriers intrépides, aux conquérants glorieux qui ont construit, décennie après décennie, les bases de l’histoire de notre peuple.

Du reste, le Mouvement National des Jeunes de l’AFP, en choisissant Fatick, pour la tenue de sa deuxième Conférence nationale, s’est inspiré des temps glorieux où les contrées évoluaient au rythme des épopées qui ont accompagné les phases successives de la construction de la nation sénégalaise, de Diakhao à Mbeuleukhé, de Sandiel à Liliyassa, de Nioro Mamour Ndary à Thyabou, de Ngoye à Ngathie, quand les populations cultivaient avec fierté le courage au combat, l’honneur, la dignité, le sens de la vérité et de la parole donnée, la vie communautaire faite de valeurs et vertus, sources et garantes des ambitions légitimes à réaliser pour le bien de tous et de chacun.

« On nous tue, on ne nous déshonore pas », cette devise constitue une référence fondamentale dans l’évolution de notre pays qui, comme l’a dit le philosophe, « marche les yeux ouverts et les sens en éveil dans ses propres profondeurs ».

Mes chers Camarades,

Votre Conférence nationale sera suivie, le 18 de ce mois de mars 2011, par la Conférence nationale des Femmes du parti.

Ces deux rencontres offrent au Congrès de l’AFP, qui aura lieu à Dakar, les 19 et 20 mars 2011, en guise de prélude, des perspectives et une source d’inspiration qui repose sur votre enthousiasme, en tant que jeunesse d’avant-garde et sur la lucidité des femmes, mères et gardiennes du patrimoine culturel du Sénégal.

Ces Conférences nationales et la tenue du Congrès, Congrès de l’avenir, Congrès de l’espoir, s’ouvrant sur l’action, toutes ces rencontres nous ramènent au milieu même du contexte de mondialisation qui prévaut sur la planète. Dans ce cadre, naissent des paradigmes nouveaux qui impliquent un type d’engagements spécifiques sans lesquels assumer et conduire les nouvelles légitimités deviennent un supplice de Tantale, qui épouse tout à la fois le mythe de Sisyphe et la mystique de l’effort, dans toutes leurs dimensions. Ces données nouvelles invitent l’être humain à maîtriser son propre environnement, comme les rameurs de la vieille tragédie grecque qui, le cœur plein d’entrain, chantaient et allaient vers le rivage en lui tournant le dos.

L’histoire va toujours plus vite que les hommes, mais les hommes font reposer sur l’histoire leurs idées, leurs projets, leurs ambitions et leur foi pour soulever les montagnes de l’inconnu et explorer les abysses de l’océan des mystères de la vie.

L’Alliance des Forces de Progrès s’est inscrite dans cette voie de la foi et de l’action, en étroite coopération avec les formations politiques membres de la Coalition Bennoo Siggil Senegaal, avec la société civile, avec les milieux confessionnels, avec les mouvements associatifs, en un mot, avec le peuple du Sénégal tout entier.

Sous cet éclairage, les jeunes de l’AFP méritent d’être félicités et encouragés parce qu’ils se sont résolument mobilisés au service de l’effort qui conduit au succès dans les entreprises humaines les plus complexes et les plus ardues. Nous sommes, avec vous, prêts à tous les combats et à tous les sacrifices pour sauver notre pays.

La grandeur du génie humain réside dans cette volonté opiniâtre d’assurer la victoire de l’intelligence et de l’effort, de la volonté et de l’endurance, sur les phénomènes qui génèrent l’action productrice de progrès, et fait barrage à l’inefficacité, au motif de découragement ou de découragement ou de résignation qui limitent à une fatalité destructrice les capacités immenses des sociétés humaines.

Vous entendez ainsi impulser, sur la base des nouvelles légitimités auxquelles aspirent les populations de notre pays, des dynamiques de progrès, avec, comme avantage et comme atout, la vigueur que porte la jeunesse et la détermination que celle-ci induit, en termes d’ambitions vers un avenir de créativité et de développement partagés au profit de tous et de chacun.

A l’issue de cette Conférence nationale, les Jeunes de notre parti, hommes, garçons et filles, qui auront atteint l’âge de 35 ans passeront, conformément aux Statuts de l’AFP, chez les adultes où ils militeront désormais, seront élus et placés démocratiquement à des niveaux de responsabilités exécutives, poursuivant ainsi leur sacerdoce de citoyens engagés au service du peuple. A ceux-là, je veux, au nom du parti, redire nos encouragements, nos vœux et nos prières, avec nos remerciements les plus sincères pour le travail qu’ils ont déjà accompli. Nous sommes certains qu’ils continueront de travailler avec les mêmes convictions.

A cet égard, hommage doit être rendu à M. Mbaye Dione qui dirige le Mouvement national des Jeunes pour le Progrès depuis plus de sept années. Notre camarade Mbaye Dione a été un dirigeant sérieux, productif, ouvert et doté d’un grand esprit d’initiative à la tête du Mouvement des Jeunes, tout en cultivant un contact permanent avec sa base politique, ce qui l’a conduit à être élu comme Conseiller rural à Ngoundiane et comme Président de cette Communauté rurale.

Avec lui et au nom du parti, je remercie tous les membres du Bureau national qui ont travaillé, d’arrache-pied, pour accomplir les missions qui vous avaient été confiées.

Au futur Secrétaire Général du Mouvement et aux membres du nouveau Bureau national qui seront élus par votre Conférence, j’adresse des encouragements chaleureux, sachant que la confiance de leurs camarades sera largement méritée et sera une source vivifiante d’actions nouvelles, en guise de contribution à l’approfondissement de la démocratie dans notre pays.

Voilà, mes chers Camarades, le message d’encouragement et de soutien que j’ai cru devoir, ce jour, vous adresser, au nom de tout le parti.

Les sociétés humaines, encore une fois, évoluent toujours dans leurs profondeurs.

La société sénégalaise est aujourd’hui au milieu du gué.

Elle doit en sortir, saine et sauve, par l’organisation logique et la mise en œuvre de ses propres capacités de relever les défis et de vaincre les obstacles.

Je sais que vos travaux vous permettront d’évoquer le drame du déficit en matière d’énergie, ce mal sénégalais qui sévit dans les familles, dans les ateliers, dans les usines, dans les écoles, dans les hôpitaux et partout où le développement est attendu, espéré. Sans aucun doute, vous évoquerez, en les analysant, l’enlisement de l’école sénégalaise, la perte des repères que subit notre jeunesse, la déshérence endémique du fonctionnement de nos Universités, la précarité du sort des enseignants notamment des corps émergents, l’absence de motivation de ceux qui dispensent le savoir face au mépris des pouvoirs publics et aux promesses non tenues, la crise casamançaise et ses effets désastreux, la situation des Sénégalais de l’extérieur, le monde paysan.

Tous ces problèmes ont des solutions.

Au mois de février 2012, lorsque les changements à la tête de l’Etat seront survenus, par la volonté de Dieu et par le vote des Sénégalais, les nouvelles équipes qui prendront le Sénégal en main, commenceront de résoudre, les uns après les autres, le lancinant dossier de l’énergie, celui des perditions scolaires et du vieillissement des infrastructures dans le domaine de l’éducation, la misère médicale et sanitaire qui sévit dans les hôpitaux et dans les centres de santé, la question des vols et des gaspillages, la paix en Casamance, la réhabilitation du monde paysan, l’exploitation rationnelle des zones aménagées dans le Delta ainsi que dans les contrées agricoles du Sud, de l’Est, du Nord et du Centre.

Pour terminer, je veux, en votre nom, féliciter les personnalités de la société civile que sont M. Abdoulatif Coulibaly, éminent journaliste s’il en fut, et M. Birahim Seck, membre distingué du Forum Civil, qui ont eu l’amabilité d’accepter votre invitation à venir parmi nous, ce jour, pour prononcer, respectivement, deux conférences de haute facture sur des sujets porteurs : « la Charte de bonne gouvernance démocratique des Assises Nationales » et « Responsabilités politiques et marchés publics au Sénégal ».

Mes félicitations vont également à nos deux camarades M. Mame Birame Diouf, membre de l’Alliance Nationale des Cadres pour le Progrès (ANCP) et M. El Hadj Diawara, du Bureau national du Mouvement des Jeunes pour le Progrès, qui traiteront respectivement les thèmes suivants : « Le Sénégal : problèmes et solutions » et : « Quelle jeunesse pour 2012 ».

Prions le Seigneur pour que l’entreprise dans laquelle nous nous sommes engagés, avec vous, jeunesse de notre parti, connaisse le succès et produise la prospérité et l’enrichissement mutuels, sur le chemin exaltant de l’action politique, laquelle, en définitive, est un humanisme créateur de bonheur et de bien-être pour tous.

Je souhaite plein succès à vos travaux et vous renouvelle, en même temps, mon soutien sans faille et sans réserve, convaincu que vous avez assimilé les leçons qui permettent de relever les défis du temps, d’abattre les murs de l’incompréhension et de partir, l’âme sereine, vers les sommets de la réussite.

Que Dieu notre Seigneur exauce nos prières

mardi 1 mars 2011

Audit du fichier électoral sénégalais : Les non-dits du rapport

Audit du fichier électoral sénégalais : Les non-dits du rapport

Le rapport global de la mission d’audit des experts de l’Union européenne et de l’Usaid a été remis solennellement au président de la République, le jeudi 27 janvier dernier. Des faiblesses ont été notées dans le processus électoral ainsi que 108 recommandations à mettre en œuvre.


Babou Birame FAYE


Audit du fichier électoral sénégalais : Les non-dits du rapport
Par cet acte solennel, le rapport global de la mission relève désormais du domaine public et doit être diffusé conformément aux engagements pris par l’Etat du Sénégal, pour permettre aux citoyens de bénéficier d’une information juste et objective, leur évitant d’être les victimes d’opérations de manipulation et de désinformation politique. La Gazette révèle au grand jour les non-dits de ce rapport.

Que cachent les autorités étatiques ? Cette question a son importance capitale, vu la manière « cavalière » dont les tenants du pouvoir abordent la question de l’audit du fichier électoral enclenché par les experts de l’Union européenne et de l’Usaid. Avant même que le rapport d’audit du fichier électoral du Sénégal ne soit envoyé, comme prévu, à tous les acteurs impliqués dans le processus électoral par les autorités contractantes de l’Union Européenne et de l’Usaid, des affirmations sur la fiabilité du fichier électoral sont savamment distillées dans la presse. Alors que sont volontairement occultées les faiblesses majeures décelées sur le processus électoral par les experts, ainsi que les recommandations urgentes sur la base des données électorales et sur le système biométrique. Pourtant, rien que sur la base des données électorales, ce sont 26 recommandations qui sont préconisées dont 13 doivent être mises en œuvre avant le 31 décembre 2011. Quant au système biométrique, ce sont 12 recommandations à mettre en œuvre avant le 31 décembre 2011.

Mais, faisant fi des recommandations fermes des auditeurs de revoir certains aspects primordiaux, les tenants du pouvoir tentent tant bien que mal de faire comprendre que le fichier électoral est fiable. Comme pour préparer l’opinion nationale et internationale à une « manœuvre politicienne » qui ne dit pas son nom ! Lors d’une conférence de presse tenue vendredi 28 janvier dernier, Serigne Mboup, coordonnateur de la Cellule initiative et stratégie (CIS) du Parti démocratique sénégalais (PDS, au pouvoir), s’est empressé de se féliciter des conclusions de la mission d’audit « indépendante » sur le fichier électoral qui, disait-il, « écartent toute contestation des résultats des prochaines élections ». Sa conviction : « Les conclusions de la mission d’audit sont un camouflet pour l’opposition et font que demain il n’y aura aucune possibilité de contestation des résultats des élections à venir ». Cette vaste opération de communication entreprise par les libéraux après la publication du rapport d’audit réveille alors des soupçons de « saupoudrage caractérisé ». Alioune Sarr, Expert NTIC et des questions électorales, Coordonnateur des experts de Bennoo Siggil Senegaal, par ailleurs Coordonnateur de l’Alliance Nationale des Cadres de l’AFP accuse : « En déclarant que le fichier est fiable, le ministre de l’Intérieur Me Ousmane Ngom est allé vite en besogne. Cela n’est pas conforme à la réalité, et ne correspond pas aux conclusions des experts. Lui et ses frères libéraux essaient de semer la zizanie. Ce qui fait susciter encore des suspicions. Et des non-dits !

Les incongruités de la mission d’audit

Photos non identifiées, potentiels doublons, détention de cartes multiples…. A la lecture du rapport de la Mission d’audit du fichier électoral (MAFE) dont nous avons copie, c’est la pertinence de certaines des conclusions qui pose problème. La légèreté avec laquelle les auditeurs ont traité des questions essentielles pour la fiabilité et la viabilité du fichier électoral est surprenante. La délicate question du nombre d’inscrits et de celle des étrangers figurant dans le fichier reste entière. Les deux problématiques étant étroitement liées. Et le processus électoral exige une inscription sur les listes conforme au droit sénégalais, un traitement sécurisé et utile des données d’identification et un vote transparent et non vicié. Or, l’audit du fichier enclenché, dans ce sens, par les experts de l’Union européenne et de l’Usaid révèle que « sur un échantillon de 21 mille 840 photos analysées, seules 15 mille 859 présentent des caractéristiques adéquates pour une reconnaissance facile par un examinateur humain ». La proportion des bonnes photos étant, nous dit-on, de 72, 6 %, avec un corps électoral de 4 millions 835 mille 631 électeurs (corps électoral de 2007), cela veut dire qu’il y a 1 million 324 mille 963 photos qui doivent être refaites pour une bonne biométrie. L’audit informe également que sur ce corps électoral, il y a 4 millions 759 mille 151 électeurs qui font l’objet d’une « comparaison adéquate », c’est-à-dire, jugés être en règle. Donc, le système est incapable d’identifier 76 mille 480 inscrits qu’il prend pour de potentiels doublons. Les experts de l’Union européenne et de l’Usaid, pour juguler cette imperfection, ont d’ailleurs proposé l’acquisition d’un logiciel spécial pour traiter les informations biométriques, notamment ce qu’on appelle le « Customer ID » (clé d’enregistrement des données biométriques).

D’autres faiblesses ont été relevées par la mission d’audit sur le fichier électoral et sur la biométrie. Sur les 6 mille 125 lieux de votes recensés au Sénégal, deux ne disposent pas d’une adresse électorale. C’est le cas de Samelah à Touba qui comporte 145 bureaux de vote, soit près de 100 mille électeurs. Et lors de l’élection Présidentielle de 2007, le candidat Abdoulaye Wade avait obtenu près de 87% des voix à Samelah ! Le second lieu de vote repéré par les experts de la mission d’audit est nommé « Mauvaise adresse électorale » qui ne dispose d’aucun bureau de vote. Ceci en parfaite violation du code électoral, car contraire à l’article L37 du code électoral qui exige que « le domicile et la résidence de l’électeur soient identifiés avant toute inscription dans les registres d’une commission administrative d’inscription ou de révision ». D’ailleurs, les experts de l’Union européenne et de l’Usaid ont émis une recommandation qui exige désormais la production d’un certificat de résidence, qui doit être délivré par les autorités de la police, de la gendarmerie.

Durant leurs enquêtes, les auditeurs ont aussi trouvé à Dakar un stock de 9 mille cartes d’électeurs non distribuées. Ils ont identifié dans ce lot, plusieurs électeurs qui disposent de 3 à 5 cartes d’électeur, confirmant ainsi une affirmation longtemps soutenue pas l’opposition réunie au sein de Bennoo Siggil Senegaal. Dans la Base de données électorales, 9 mille 632 électeurs dont les champs « Nom et Prénom » ne sont documentés que par des dates de naissance ou par des étoiles. Cela confirme aussi une autre vérité sur le fichier électoral constatée en 2007. Et sur les 17 mille 766 adresses électorales créées, seules 16 mille 836 sont affectées à des électeurs. Donc, il existe 930 adresses électorales non utilisées et qui ne sont affectées à aucun électeur. Question : quelle est la pertinence technique à garder dans le fichier ces adresses électorales ? L’un des principes essentiels dans la conception et la modélisation d’une base de données, étant celui de la pertinence et de la non-redondance de l’information stockée.

La biométrie indexée

Dunia Ramazani, l’expert en biométrie de la mission, membre de la mission d’audit, est ferme sur la question de la biométrie. Il indique que « c’est uniquement après la mise en œuvre des douze recommandations biométriques, avant le 31 décembre 2012, que le système biométrique AFIS sera apte à être utilisée convenablement pour les élections présidentielle et/ou législatives de 2012 ». Donc, pas avant de régler ce préalable du traitement de la question de la biométrie. Contrairement à ce que certains insinuent, les résultats de l’examen de l’adéquation technologique restitué au comité technique restent peu convaincants. Et le système AFI (En anglais, Automated Fingerprint Identification, Identification automatique par empreintes digitales) permettant de réaliser des identifications (authentifications, recherches ouvertes) basées sur les empreintes digitales, est remis en cause par les experts de l’opposition. Les auditeurs, eux-mêmes, indiquent que « plus de 1,5 million de photos sur les 5 millions que compte le fichier ne sont pas claires et l’analyse du système AFI n’est pas fiable et ne permet pas de déceler les inscriptions multiples ». Dès lors, ni les photos, ni les cartes dites numérisées ne permettent d’identifier les électeurs à coup sûr (page 6 des conclusions). Pourquoi les auditeurs n’ont pas recommandé la fermeture des bureaux de vote à la fin de la journée et l’usage de l’encre indélébile ou tout autre moyen permettant d’éviter les votes multiples ? Aucune réponse à cette question cruciale !

De surcroît, les auditeurs n’ont fait aucun travail de rapprochement et/ou de comparaison des inscriptions sur les listes électorales d’avec les preuves de la nationalité, alors que dans le code électoral sénégalais, il est mentionné : « ne doivent s’inscrire sur les listes que les personnes qui ont la nationalité sénégalaise ». A cet égard, l’article Premier du Titre premier du code de la nationalité dispose : « est Sénégalais tout individu né au Sénégal d’un ascendant au premier degré qui y est lui-même né ». Pourtant, le ministère de l’Intérieur, organisateur des élections indique, lui-même, que « près d’un million d’électeurs se sont inscrits sur la base d’un simple extrait de naissance ». Pourquoi les auditeurs n’ont-ils pas vérifié la conformité des inscriptions à l’état civil sénégalais ? Ils se contentent de déclarer que cela sortait de la « compétence électorale ». Alors qu’il suffisait de prendre un échantillon d’inscrits sur la base d’un extrait de naissance et vérifier qu’ils sont de véritables nationaux. Comme le recommande le code électoral auquel ces auditeurs font référence.

Des étrangers dans le fichier ?

Selon le rapport 2010 de l’Ansd (Agence nationale de la statistique et de la démographie), le Sénégal a connu, ces dernières années, d’importantes vagues d’immigrants à cause de l’instabilité des Etats alentours. Les Guinéens à eux seuls seraient 2,5 millions sur le territoire sénégalais (selon des sources diplomatiques guinéennes basées à Dakar). Et ils ne sont pas les seuls étrangers à vivre nombreux au Sénégal. Or, le code électoral indique que « ne doivent s’inscrire sur les listes que les personnes qui ont la nationalité sénégalaise ». Au vu de ce qui précède, déclarer comme l’ont fait les auditeurs, que « l’intégrité, l’exactitude et l’exhaustivité des données, ainsi que la conformité des procédures d’inscription avec les textes réglementaires par la présentation des justificatifs nécessaires sont garanties », est une ineptie. Pour réaliser un fichier électoral informatisé digne de ce nom au Sénégal, il aurait fallu respecter le code de la nationalité sénégalaise et le code électoral qui disent en substance que « pour être électeur, il faut être Sénégalais âgé de 18 ans révolus, jouir de ses droits civils et politiques et ne pas être incapable ». Ousmane Badiane de la Ld s’indigne : « Cela n’a pas été le cas en 2007. Loin s’en est fallu ». Il informe que les auditeurs ont également fait fi d’une bonne exploitation des données démographiques et de la pyramide des âges au Sénégal. « Aucune référence sérieuse n’a été faite à ces données. Déclarer, en se basant sur les chiffres de 2002, que sur le fichier électoral du Sénégal sont inscrits 82% de la population majeure sénégalaise, corrobore la thèse qui consiste à dire qu’on ne peut pas avoir 5 millions d’inscrits sur le fichier car 82 % de la population de plus de 18 ans en 2007 équivalait à bien moins de 5 millions », ajoute Alioune Sarr.

Les données relatives à la population sénégalaise en âge de voter sont quand même disponibles et publiées par l’Ansd. Et le caractère très jeune de la population sénégalaise est d’ailleurs confirmé dans le rapport 2010 de l’Ansd, qui révèle qu’en 2009, 42 % des Sénégalais ont moins de 15 ans et 51 % moins de 20 ans (56 % en 2002). Donc, se baser sur des chiffres de 2002 pour évaluer une élection de 2007 relève d’un amateurisme nonchalant. Les données (« fichiers ») relatives à la population sont régulièrement publiées par l’Ansd et peuvent servir de base de calcul. Dire que la proportion d’étrangers dans la population du Sénégal est de 1 % dénote une ignorance totale ou une paresse intellectuelle. Pis, lorsqu’il a été question des étrangers inscrits sur le fichier électoral, les auditeurs ont parlé de « rumeurs » et ont déclaré que « les données du dernier recensement général de la population, datant de 2002, indiquent une proportion de 1% d’étrangers au Sénégal. Réaliser des projections spécifiques sur l’évolution des non nationaux jusqu’en 2010, ne serait pas raisonnable en l’absence de fichiers appropriés. Néanmoins, il est déraisonnable de laisser croire que de telles proportions d’étrangers sont inscrites sur le fichier électoral ». Soit. Mais, le ministère de l’Intérieur aura du mal à convaincre les Sénégalais les moins sceptiques que, sur une population de 11 millions d’habitants en 2007, cinq millions de Sénégalais s’étaient inscrits sur les listes électorales alors que la population en âge de voter était évaluée, en 2007, à moins de 40 % du total. Aussi, le fichier électoral consensuel de 2000 ne comptait-il que 2 millions 619 mille 799 inscrits. Doubler le nombre des inscrits en 7 ans alors que la population n’a pas évolué dans les mêmes proportions est quand même surprenant.

Et si l’on sait que près d’un million (selon le ministère de l’Intérieur) d’électeurs se sont inscrits sur la base d’un simple extrait de naissance, pourquoi les auditeurs n’ont-ils pas vérifié la conformité des inscriptions à l’état civil sénégalais au lieu de déclarer que cela sortait de la « compétence électorale » ? « Pourtant, il est établi que des étrangers ont profité de la refonte de 2006 pour disposer de la carte nationale d’identité numérisée et être indûment présents dans le fichier électoral. Les libéraux crient sur tous les toits que l’opposition a gagné les élections locales sur la base du ficher de 2007 qu’ils considèrent donc comme fiable. Mais, ils ignorent que les élections locales se font pas sur la base du même gisement des électeurs parce que les milliers d’étrangers qui ont, à vive voix remercié Abdoulaye Wade de leur avoir permis d’obtenir leur Carte d’identité nationale sénégalaise en votant pour lui à la présidentielle, ne sont pas impliqués lors des locales par peur de représailles », explique le Coordonnateur de l’Alliance Nationale des Cadres de l’AFP. En effet, la possibilité d’obtenir la carte d’identité nationale sénégalaise sur la base d’un simple extrait de naissance datant de moins de 6 mois et de pouvoir s’inscrire sur les listes électorales est une porte ouverte à toutes sortes de spéculations et de manœuvres frauduleuses permettant même à tout « individu » de s’inscrire autant de fois qu’il voudrait.

Un fichier toujours piégé

Même si le rapport d’audit confirme à demi mots l’inexistence ou tout au moins, l’inutilité de la biométrie qui a coûté près de 20 milliards de francs Cfa au contribuable sénégalais, il s’agit d’un audit incomplet, insuffisant à certains endroits et non garant de la fiabilité et de la viabilité du fichier. Car, l’absence d’une analyse globale aussi bien sur le plan législatif, réglementaire que processuel, enlève à cet audit son intérêt principal : celui d’édifier les Sénégalais sur l’existence d’un fichier conforme au droit national, incontesté parce que consensuel comme l’a été celui de 2000 et base d’un processus électoral fiable et non partisan. Mais malgré l’audit enclenché par les experts de l’Union européenne et de l’Usaid, il semble que le climat de suspicion qui règne entre le pouvoir et l’opposition perdure.

Pis, lorsqu’il a été démissionné en 2010, l’ancien Président de la CENA Mamadou Moustapha Touré, a creusé l’abcès en révélant ses doutes sur l’existence du chiffre de 5 millions avancé par le Ministère de l’Intérieur. Dans une interview accordée à La Gazette, Monsieur Touré faisait l’annonce d’un différentiel de plus d’un million d’électeurs entre le fichier de la Cena et celui du ministère de l’intérieur. Mais, dans leur rapport, les auditeurs estiment qu’ils ont pu « confronter les informations obtenues de la CENA et de la DAF sur le doute laissé dans l’opinion en 2007, après l’exercice de la refonte, lorsque la CENA avait annoncé un nombre d’électeurs inscrits de 3,7 millions, peu après que le ministère a annoncé un total d’électeurs dans le fichier de 4,9 millions ». Ils en ont conclu que « la raison de cette rumeur s’explique par le fait que la DAF avait dans un premier temps remis à la CENA un CD-Rom pour lequel les procédures de copies n’avaient pas été complétées. La révision de la copie du CD-Rom fut réalisée en quelques heures, alors que l’information avait déjà été diffusée auprès de l’opinion ».

Cette explication pour le moins laconique d’une remontrance fondamentale relative au fichier est stupéfiante. Pourquoi ? Parce que d’abord, l’informaticien de la CENA qui avait été interrogé à l’époque, assurait n’avoir pas reçu un CD ROM, mais une clé USB. Ensuite, parce que le rôle dévolu à la CENA par la loi est de superviser et contrôler tout le processus d’établissement et de gestion du fichier électoral. « La CENA n’a pas à recevoir et accepter les données du ministère de l’Intérieur pour acquis. La CENA doit au contraire contrôler l’exactitude des fichiers du ministère de l’Intérieur », dénonce Serigne Mbaye Thiam, un des experts de Bennoo Siggil Senegaal. Il informe que « face à un Ministre de l’Intérieur partisan, le seul moyen d’avoir un décompte objectif et exact du nombre d’inscrits tient dans les récépissés de la CENA dans la mesure où tout électeur passe forcément par la CENA qui lui délivre un récépissé et garde le deuxième exemplaire ». Tout ceci n’a pas été fait ! Et des questions restent sans réponse : Pourquoi ce travail n’a jamais été fait ? Pourquoi la CENA n’a-t-elle jamais publié ses chiffres comme annoncé au lieu d’être à la remorque du ministère de l’Intérieur ? A la fin de la mission d’audit, peut-on dire que le fichier électoral est fiable ? Aucune réponse crédible à ces questions. Et sans réponses à ces questions cruciales, il n’est pas exagéré de dire que le fichier électoral du Sénégal reste toujours piégé.

Ces dates qui servent de repères

Au Sénégal, plusieurs années historiques sont à rappeler. La tradition électorale exige une prise en compte de certaines dates repères qui peuvent servir de gage. L’année 1977, où a été constitué le premier fichier électoral informatisé en vue des élections de 1978. L’année 2000, où la loi 2000-25 du 1er septembre 2000, portait mise à jour des listes électorales, constituées par les électeurs ayant voté au 1er ou au 2nd tour de l’élection présidentielle de 2000 : le nouveau noyau dur était alors constitué de 1 million 926 mile 241 électeurs. L’année 2004 constitue également un tournant de l’évolution politique du Sénégal. C’est l’année où la loi 2004-32 du 25 août 2004 annule toutes les listes électorales et prescrit l’établissement de nouvelles listes basées uniquement sur une carte nationale d’identité numérisée. Cette refonte aboutit à un nouveau fichier électoral avec 4 millions 917 mille 160 électeurs théoriques à la fin de l’opération, le 15 septembre 2006. C’est ce fichier qui a permis l’organisation de l’élection présidentielle du 25 février 2007, avec 3 millions 424 mille 926 suffrages valablement exprimés. L’année 2008 avec les décrets N° 2008-747 du 10 juillet 2008, n° 2008-749 du 10 juillet 2008, n° 2008-1496 du 31 décembre 2008, portant création de nouvelles collectivités locales au Sénégal s’avère être une coïncidence troublante.

Malgré la proximité des élections locales avec les citoyens-électeurs Pour la simple raison que lors des élections locales de mars 2009, le nombre de suffrages valablement exprimés a été de 2 millions 109 mille 498, soit une baisse de 38%, par rapport à 2007, soit 1 million 315 mille 428 électeurs de moins. Enfin, l’année 2010 avec la révision exceptionnelle du fichier électoral d’une durée de six mois, du 01 février au 31 juillet 2010, sans aucune possibilité pour de nouveaux électeurs de s’inscrire, puisque la fabrication des cartes nationales d’identité était arrêtée pendant huit mois. Ainsi, nous constatons qu’entre 2000 et 2010, le fichier électoral sénégalais a subi deux mutations majeures (2000 et 2004), une modification structurelle de taille (2009), et un changement potentiel de son contenu (2010). Et la révision exceptionnelle des listes électorales prévue en cette année 2011 ne promet rien de rassurant.

Il apparaît donc clairement, qu’à chaque échéance politique importante la forme, le contenu ou la structure du fichier électoral est modifiée par le régime libéral. Dans l’appréciation qui est faite sur la fiabilité du fichier électoral, il était intéressant d’étudier et de comprendre l’option politique qui a sous-tendu ces restructurations successives qui remettent en cause la stabilité, la permanence et l’intégrité de ses structures de traitement et de données.

Audit du fichier électoral sénégalais : Les non-dits du rapport
D’autre part, il fallait élucider le passage brusque de 3 millions 424 mille 926 suffrages exprimés à la présidentielle de février 2007 aux 2 millions 109 millions 498 suffrages exprimés aux élections locales de mars 2009, soit une réduction de 38%. Que nous réserve l’élection présidentielle de 2012 ?

mardi 1 février 2011


Niasse formula pour que lumière soit
Pour sauver la Senelec : Moustapha sort la Niasse formula - Réduction de 30 à 40% du budget de la Présidence - Diminution de 50% des frais de voyage de Wade et des perdiem de son staff


Niasse formula pour que lumière soit
Un dossier menaçant pour le développement du pays

Une gouvernance à problèmes : La production d’énergie au Sénégal est devenue un casse-tête lancinant et durable, autant pour le gouvernement que pour les consommateurs d’électricité, donc pour la croissance et le développement. Cette situation résulte des divers facteurs que sont, tour à tour, l’imprévision dans la planification de la production d’électricité, la non prise en compte de l’augmentation des consommateurs (entreprises, ménages, services, institutions publiques et organismes sociaux), l’opacité et les combines qui accompagnent les contrats d’approvisionnement dans les matières de base (fuel et gaz), la corruption qui en est la caractéristique principale et la non-implication de la Senelec, en tant qu’entreprise essentielle, dans le processus.

Le manque de transparence dans la gestion du secteur dont la gestion est assurée à 90% au moins par le ministère de l’Energie, en lieu et place de la Senelec elle-même. De ce fait, la mission de tutelle qui est celle du ministère dans ses rapports avec la Senelec, s’est transformée en un comportement de substitution pure et simple, qui fait du ministère de l’Energie la société chargée de produire et de vendre l’énergie, de négocier et de signer les contrats d’approvisionnement en combustibles et en gaz et de se livrer à la recherche de financements bancaires ou autres à la place de la Senelec.
Comment expliquer autrement que les consommateurs sénégalais se voient donner un rendez-vous à l’année 2014, pour la fin des délestages qui causent présentement au Sénégal des dégâts et des préjudices incommensurables qui créent le ras-le-bol, et provoquent de violentes manifestations de la part des populations et freinent la croissance économique, depuis plusieurs années ?

Quelles solutions ?

Au niveau structurel, il faut permettre à la Senelec de retrouver et de mettre en œuvre la plénitude de ses responsabilités, dans la conduite de sa mission.

La Senelec, dans ce cadre, doit pouvoir gérer la question des commandes de fuel et de gaz, destinés à alimenter les générateurs et turbines en fuel et en gaz, comme l’induit sa mission.

La Senelec doit retrouver, comme il y a une vingtaine d’années, la possibilité de négocier elle-même, en toute sérénité, dans la transparence et en toute indépendance, les contrats concernant les approvisionnements en combustibles et en gaz. Ainsi, elle négociera et signera, dans des conditions claires, les dispositions contractuelles concernant la période des approvisionnements, la planification des arrivées des bateaux fournisseurs, les prix d’acquisition du fuel et du gaz ainsi que le respect scrupuleux des quantités commandées et de la certification sécurisée de la qualité des produits fournis.

Cette mesure permettra d’éviter, à l’avenir, ces querelles vaines et ces controverses nihilistes que les Sénégalais regrettent et déplorent, dans les affres des ténèbres qui hantent leurs nuits et leurs angoisses quotidiennes.

Le ministère de l’Energie doit se limiter à l’exercice de la tutelle, en s’assurant que le courant électrique soit disponible, en permanence, pour les entreprises, les ménages, les Pme/Pmi, les hôpitaux, les établissements d’enseignement, les services et les lieux du culte. Dans ce cas de figure, le Conseil d’administration de la Senelec et le Directeur général de la société seront seuls responsables de la gestion de la compagnie et de l’accomplissement de ses missions.

Que le ministère de l’Energie, en conséquence, ne s’occupe plus des commandes de fuel et de gaz, encore moins des équipements de la Senelec, comme c’est le cas à la Sonatel dans la gestion de laquelle le ministère de tutelle, celui chargé des Télécommunications, n’est nullement mêlé, de près ou de loin.

Pourquoi ce qui est possible à la Sonatel ne le serait-il pas à la Senelec, l’une et l’autre société occupant, chacun le sait, une place première dans le développement et dans la modernisation du Sénégal ?

Mesures pratiques

Etablir, de manière claire et définitive, avec le concours de la Cour des comptes, le montant de l’endettement effectif de la Senelec au 28 février 2011.

Identifier les créanciers de la Senelec et négocier avec chacun d’eux un échéancier de paiement des créances dues, en mettant l’accent sur l’effort de patience qui sera demandé aux uns et aux autres, dans le but de pouvoir assainir, dans les délais les plus raisonnables, la situation de trésorerie de la Senelec.

Obtenir du Trésor public sénégalais - ce qui est tout à fait possible -, pour moitié et pour bailleurs de fonds, pour l’autre moitié, les crédits nécessaires pour libérer la Senelec de son endettement vis-à-vis de ses créanciers, dans les délais fixés d’un commun accord avec ces derniers.

Pour couvrir la moitié des crédits nécessaires au paiement des créances dues par la Senelec, il est possible d’envisager une réduction de 30 à 40% du budget alloué à la présidence de la République pour l’année 2011. Cette mesure permettrait de rassembler entre 30 et 40 milliards de francs Cfa pour l’année en cours. Ces montants seraient mis à la disposition de la Senelec par le Trésor public, au motif que la question de l’énergie constitue une urgence nationale de même qu’une source possible de déstabilisation du pays, aux plans économique et politique.

Elaborer, immédiatement, un plan de réduction des coûts directs du train de vie de l’Etat, en ce qui concerne les dépenses budgétaires dont l’utilité n’est pas prouvée. Les exemples foisonnent, à cet égard.

Dès le départ, deux chapitres devraient être touchés, par une réduction de 50% des montants inscrits sur le budget 2011 : le coût des déplacements du chef de l’Etat à l’étranger et les crédits de frais de missions des fonctionnaires et autres agents publics durant l’année 2011.


Niasse formula pour que lumière soit
Evidemment, de telles propositions ne peuvent être acceptées et mises en œuvre que si le chef de l’Etat en personne et son gouvernement acceptent le sacrifice d’abandonner les discours et les promesses vaines, pour s’engager dans une croisade de responsabilités au service du peuple, en écoutant, en entendant et en comprenant les plaintes des populations de notre pays.

Par Moustapha NIASSE - Ancien Premier Ministre du Sénégal

Niasse demande à l’Etat de laisser la Senelec piloter la gestion de l’énergie

La question énergétique est devenue préoccupante au Sénégal. Pour une sortie de crise, le leader de l’alliance des forces du progrès (Afp), Moustapha Niasse a jugé, dans un communiqué daté du lundi 31 janvier, que le ministère de tutelle doit se démarquer de la gestion de l’énergie et laisser la Senelec administrer la production ainsi que le renouvellement de ses équipements comme c’est le cas à la Sonatel. Toutefois, M. Niasse a avancé que de telles propositions ne peuvent être acceptées et mises en œuvre que si le Chef de l’Etat en personne et son gouvernement acceptent le sacrifice d’abandonner les discours et les promesses vaines, pour s’engager dans une croisade de responsabilités au service du peuple, en écoutant, en entendant et en comprenant les plaintes des populations de notre pays.


Niasse demande à l’Etat de laisser la Senelec piloter la gestion de l’énergie
Le leader de l’Alliance des forces du progrès (Afp), Moustapha Niasse a préconisé une sortie de crise dans le domaine de l’énergie. Selon lui, la production d’énergie au Sénégal est devenue un casse-tête lancinant et durable, autant tant pour le gouvernement que pour les consommateurs d’électricité, donc pour la croissance et le développement.

A cet effet, l’ancien Premier ministre du Sénégal a préconisé que la Senelec devienne autonome et que le ministère de tutelle arrête de s’occuper des problèmes énergétiques. « Le ministère de l’Energie, en conséquence, ne doit plus s’occuper des commandes de fuel et de gaz, encore moins des équipements de la Senelec, comme c’est le cas à la Sonatel dans la gestion de laquelle le ministère de tutelle, celui chargé des Télécommunications, n’est nullement mêlé, de près ou de loin». Et M. Niasse de se demander « pourquoi ce qui est possible à la Sonatel ne le serait-il pas à la Senelec, l’une et l’autre société occupant, chacun le sait, une place première dans le développement et dans la modernisation du Sénégal». Ainsi Moustapha Niasse au niveau structurel soulignera que la Senelec doit retrouver, comme il y a une vingtaine d’années, la possibilité de négocier elle-même, en toute sérénité, dans la transparence et en toute indépendance, les contrats concernant les approvisionnements en combustible et en gaz.

De ce fait, « elle négociera et signera, dans des conditions claires, les dispositions contractuelles concernant la période des approvisionnements, la planification des arrivées des bateaux fournisseurs, les prix d’acquisition du fuel et du gaz ainsi que le respect scrupuleux des quantités commandées et de la certification sécurisée de la qualité des produits fournis» a soutenu M. Niasse. Et de poursuivre « le ministère de l’Energie doit se limiter à l’exercice de la tutelle, en s’assurant que le courant électrique soit disponible, en permanence, pour les entreprises, les ménages, les Pme Pmi, les hôpitaux, les établissements d’enseignement, les services et les lieux du culte. Dans ce cas de figure, le Conseil d’Administration de la Senelec et le Directeur général de la société seront seuls responsables de la gestion de la compagnie et de l’accomplissement de ses missions.»

Mesures pratiques

Moustapha Niasse dans la problématique de l’énergie a préconisé des mesures pratiques. Selon M. Niasse, il faut établir, de manière claire et définitive, avec le concours de la Cour des Comptes, le montant de l’endettement effectif de la Senelec au 28 février 2011. « Il faut identifier les créanciers de la Senelec et négocier avec chacun d’eux un échéancier de paiement des créances dues,dans le but de pouvoir assainir, dans les délais les plus raisonnables, la situation de trésorerie de la Senelec .

Obtenir du Trésor public sénégalais, pour moitié et pour bailleurs de fonds, pour l’autre moitié, les crédits nécessaires pour libérer la Senelec de son endettement vis-à-vis de ses créanciers, dans les délais fixés d’un commun accord avec ces derniers. Pour couvrir la moitié des crédits nécessaires au paiement des créances dues par la Senelec, il est possible d’envisager une réduction de 30% à 40 % du budget alloué à la Présidence de la République pour l’année 2011 ; Cette mesure permettrait de rassembler entre 30 et 40 milliards de francs CFA pour l’année en cours.

Ces montants seraient mis à la disposition de la Senelec par le Trésor public, au motif que la question de l’Energie constitue une urgence nationale de même qu’une source possible de déstabilisation du pays, au plan économique et au plan politique. Elaborer, immédiatement, un plan de réduction des coûts directs du train de vie de l’Etat, en ce qui concerne les dépenses budgétaires dont l’utilité n’est pas prouvée. Les exemples foisonnent, à cet égard. Dès le départ, deux chapitres devraient être touchés, par une réduction de 50% des montants inscrits sur le budget 2011 : le coût des déplacements du Chef de l’Etat à l’étranger et les crédits de frais de missions des fonctionnaires et autres agents publics durant l’année 2011».

Malgré la préconisation de solutions considérées comme urgentes, M. Niasse en déduit que de telles propositions ne peuvent être acceptées et mises en œuvre que si le Chef de l’Etat en personne et son gouvernement acceptent le sacrifice d’abandonner les discours et les promesses vaines, pour s’engager dans une croisade de responsabilités au service du peuple, en écoutant, en entendant et en comprenant les plaintes des populations de notre pays.

Les causes des délestages

Selon le leader de l’Afp, les causes des délestages intempestives sont dues en grande parti par une mauvaise politique gouvernementale. Une situation qui résulte selon lui des divers facteurs que sont, tour à tour, l’imprévision dans la planification de la production d’électricité, la non prise en compte de l’augmentation des consommateurs (entreprises, ménages, services, institutions publiques et organismes sociaux), l’opacité et les combines qui accompagnent les contrats d’approvisionnement dans les matières de base (fuel et gaz), la corruption qui en est la caractéristique principale et la non implication de la Senelec en tant qu’entreprise essentielle, dans le processus.

Pour Moustapha Niasse, il s’y ajoute le manque de transparence dans la gestion du secteur. « Une gestion qui est assurée à 90% au moins par le ministère de l’Energie, en lieu et place de la Senelec elle-même.

Niasse demande à l’Etat de laisser la Senelec piloter la gestion de l’énergie
De ce fait, la mission de tutelle qui est celle du ministère dans ses rapports avec la Senelec, s’est transformée en un comportement de substitution pure et simple, qui fait du ministère de l’Energie la société chargée de produire et de vendre l’énergie, de négocier et de signer les contrats d’approvisionnement en combustible et en gaz et de se livrer à la recherche de financements bancaires ou autres à la place de la Senelec » a renseigné M. Niasse.

lundi 31 janvier 2011

«Jamais, je n’aurais autorisé Itoc à travailler avec des voleurs»

MOUSTAPHA NIASSE SUR LE CONTENTIEUX LIE À L’APPROVISIONNEMENT EN FUEL :


«Jamais, je n’aurais autorisé Itoc à travailler avec des voleurs»
En marge de la cérémonie de récital de Coran pour le défunt Mamadou Dia, Moustapha Niasse, Secrétaire général de l’Alliance des forces de progrès (Afp), est revenu sur le contentieux opposant Itoc à l’Etat du Sénégal. Ancien actionnaire dans cette société, M. Niasse affirme que jamais, il n’aurait «autorisé Itoc à travailler avec des voleurs». Bien qu’il ait quitté Itoc, cette société spécialisée dans l’approvisionnement en fuel, «depuis 10 ans», Moustapha Niasse estime que celle-ci a commis l’erreur de traiter avec l’Etat du Sénégal.

«Si j’étais responsable d’Itoc, dit-il, je n’aurais jamais travaillé avec ceux qui ont volé l’argent du Sénégal. Jamais, je n’aurais autorisé Itoc à travailler avec des margoulins, des voleurs, des fossoyeurs de l’économie nationale qui sont spécialisés dans les détournements de deniers publics.» Ceci dit, M. Niasse s’est prononcé sur les causes des coupures d’électricité. Pour l’ex-Premier ministre, cela est dû à la mauvaise qualité du fuel. «Tant qu’on continuera à voler l’argent des Sénégalais en achetant du fuel frelaté à bas prix, il y aura des délestages.»

Pour asseoir ses propos, Moustapha Niasse fait une démonstration de chimie : «Quand le fuel est frelaté, les molécules qui se trouvent dans les hydrocarbures sous terre avant qu’on ne les sorte à l’état brut, sont des molécules d’acide, de phosphore de vanadium et de cadmium. Lorsque le fuel vieillit, ces molécules vieillissent.» Puis de poursuivre : «Lorsqu’on met ce fuel-là qui permet de faire fonctionner les turbines qui produisent l’électricité, il passe de l’état liquide à l’état gazeux et à la vitesse où on les projette dans les injecteurs des turbines, cela devient des cristaux.

«Jamais, je n’aurais autorisé Itoc à travailler avec des voleurs»
Ce sont ces cristaux-là qui cassent ces turbines.» Résultat : les machines s’arrêtent ; les délestages reprennent de plus belle. La recette de Niasse est la suivante : «Pour mettre fin aux délestages, il faut acheter du bon fuel en qualité et en quantité.»

dgbaya@lequotidien.sn

jeudi 9 décembre 2010

MOUSTAPHA NIASSE PRESIDENT ?

Quelques extraits d'une interview dans "Afrique-Education" N° 219-220 du 1er au 31 janvier 2007

http://www.afriqueeducation.com/




Après avoir soutenu Abdoulaye Wade au deuxième tour de la présidentielle de 2000, soutien qui, de manière incontestable, a fait accéder l’actuel président à la magistrature suprême du Sénégal pour sept ans, Moustapha Niasse qui jouit d’une très grande popularité au Sénégal, va à nouveau se lancer dans la bataille de la présidentielle de février 2007. Cette fois-ci, ce sera pour le compte de la Coalition Alternative 2007 (CA 2007) qui regroupe onze partis politiques et plusieurs associations. Moustapha Niasse est un Homme d’Etat dans tous les sens du terme, qui jouit d’une très bonne image en Afrique et dans le monde. Ancien secrétaire général des Nations-Unies, Kofi Annan s’était servi de son savoir-faire pour ramener la paix et un peu plus de stabilité en République démocratique du Congo (RDC), avec le succès que l’on sait. Musulman convaincu, Moustapha Niasse prône un islam tolérant et garde d’excellentes relations dans les monarchies du Golfe. Il est avec le révérend Desmond Tutu, le seul représentant africain au sein du très restreint club, le High Level Group des Nations-Unies. Il est très apprécié par la Mère de la nation sud-africaine, Winnie Mandela. Il a le numéro de téléphone direct de Thabo Mbeki. Il déjeune avec le patriarche Ondimba. Il a un accès direct aux différents Grands de ce monde, qu’ils soient européens, américains ou asiatiques. La CA 2007, en le désignant pour porter ses couleurs, a fait le bon choix. Moustapha Niasse dispose de tous les atouts pour devenir le prochain président du Sénégal. Le Sénégal de ce début 2007 a besoin à sa tête d’un homme rigoureux, stable, intègre et compétent comme Moustapha Niasse. C’est tout le mal qu’on peut souhaiter aux Sénégalais.

Pour mieux connaître ce candidat, votre bimensuel s’est rapproché de lui.

1. Afrique-Education : Monsieur le Secrétaire Général, vous venez de terminer votre mandat d’Envoyé spécial du Secrétaire Général de l’ONU en RDC. Que peut-on garder de ce mandat spécial ?

C’est au mois de mai 2001 que le Conseil de Sécurité de l’ONU m’a désigné, sur une proposition commune de M. Kofi Annan et de l’ancien Président du Botswana, Sir Ketumile Masiré, alors Facilitateur du Dialogue intercongolais, comme Envoyé Spécial du Secrétaire Général de l’ONU sur le processus de paix en République Démocratique du Congo. Une Résolution de l’ONU définissait le contenu de ma mission et les objectifs qui m’étaient assignés. A savoir organiser des consultations avec les Chefs d’Etat du Rwanda et de la RDC pour les conduire à signer un accord de paix. Ensuite, réunir à Prétoria les composantes et entités congolaises, au nombre de huit, et obtenir d’elles un cessez-le-feu définitif pour aller avec elles à la signature d’un Accord global et inclusif. Enfin, élaborer une Constitution pour une période de transition de deux années et, une fois cela obtenu, préparer le passage aux élections, tout cela sous l’égide de l’ONU.

Une équipe de neuf personnes a été mise à ma disposition, à cet effet. Grâce à Dieu et aux prières de mes parents, j’ai pu accomplir cette mission, sur une période de 18 mois et nous avons signé l’Accord global et inclusif de Prétoria le 17 décembre 2002. C’est l’aboutissement de ce processus que nous avons consacré, le 6 décembre 2006, à Kinshasa, par la prestation de serment du Président Joseph Kabila, Président élu de la RDC , en présence de nombreux Chefs d’Etat et des représentants de la communauté internationale. Aujourd’hui, la RDC entame une nouvelle étape de son destin et de son histoire. Le peuple congolais a prouvé qu’il était capable de réaliser son unité autour de l’essentiel et d’assumer ses responsabilités dans le concert des nations. Je remercie le Secrétaire Général de l’ONU, un homme d’éminentes qualités et un diplomate exceptionnel, pour la confiance qu’il a placée en moi, de même que j’exprime ma gratitude à l’endroit du peuple congolais qui a soutenu mon action, tout au long de ma mission, et qui m’a adopté comme un frère.

2. Vous êtes également membre du High Level Group des Nations-Unies. Qu’est ce que c’est ?

Sur la base d’une Résolution de l’Assemblée Générale de l’ONU, le Sommet du Millénium a adopté, à New York, l’idée de créer une Alliance des Civilisations, dans le double but de réduire voire de faire disparaître la fracture existant entre le monde judéo-chrétien occidental et le monde islamique, d’une part, et de favoriser un dialogue cohérent et propice à la paix entre les cultures et les civilisations, de par le monde. D’autre part, M. Kofi Annan, Secrétaire Général de l’ONU, ayant reçu pour mission de préparer la réalisation de ce projet, a désigné 18 personnalités regroupant l’ensemble des aires de culture et de civilisation, dans le cadre d’un Groupe de Haut Niveau dont la mission était de lui présenter un rapport sur le sujet, avec des propositions concrètes. Une période de 18 mois nous était donnée pour travailler sur le projet. L’Afrique au Sud du Sahara était représentée dans ce Groupe de Haut Niveau, par l’Archevêque Desmond Tutu, Prix Nobel de la Paix et citoyen sud-africain et par moi-même. La désignation des membres du Groupe de Haut Niveau s’est faite intuiti personae. Sur le reste de l’Afrique, un Conseiller de Sa Majesté le Roi Mohamed VI, un ancien Ministre de l’Education de Tunisie et le Directeur de la Bibliothèque d’Alexandrie en Egypte, complétaient les cinq représentants du continent africain. Les Premiers Ministres d’Espagne et de Turquie ont parrainé, activement, le projet. Après quatre sessions tenues successivement à Palma de Majorque, dans l’Etat du Qatar, au Sénégal et en Turquie, les conclusions de nos travaux ont été présentés, à Istanbul, à la mi-novembre 2006, sous la forme d’un rapport, au Secrétaire Général de l’ONU et aux Chefs de Gouvernement de l’Espagne et de la Turquie. Le successeur de M. Kofi Annan gérera la suite du processus et procédera, plus tard, à la mise en place de l’Alliance des Civilisations, sous l’égide de l’ONU.

3. Au même moment où vous effectuez cette mission onusienne, vous suivez de près la situation politique sénégalaise à quelques semaines de la présidentielle du 25 février prochain. En tant qu’ancien Premier Ministre, vous êtes responsable d’une partie des résultats des libéraux. Quel bilan faites-vous de votre passage dans le premier gouvernement d’Abdoulaye Wade ?

Lorsqu’on a été Premier ministre et Chef du Gouvernement dans un pays donné, l’on assume toujours une part du bilan du régime, pour la période de temps pendant laquelle ces fonctions ont été exercées. Sous ce regard, ayant pris part, à un niveau élevé, à la conduite des affaires du Sénégal, sous le régime de l’alternance, pendant près d’une année, il est évident qu’il n’y a pour moi aucune difficulté à accepter ma part de responsabilité. Pendant les 11 mois où j’ai été Premier ministre du président Abdoulaye Wade, je me suis évertué à initier et à entreprendre des actions cohérentes, en concertation avec le Chef de l’Etat, dans les divers domaines de l’économie de notre pays, dans celui de la consolidation de l’Etat de droit, dans le soutien aux franges fragiles de la société sénégalaise comme les femmes, les jeunes, les personnes âgées, les chômeurs, le monde paysan, les artisans. Dans le même temps, j’ai assisté le Chef de l’Etat dans sa volonté de promouvoir une image du Sénégal, en Afrique et ailleurs, qui reflète les valeurs de notre pays, dans le respect de nos partenaires et dans la gestion de nos intérêts communs.

C’est après mon départ du Gouvernement - un évènement survenu par la Grâce de Dieu et au moment où il le fallait - que certaines dérives ont commencé, çà et là, à surgir dans le mode de gouvernance du Sénégal. Ces dérives continuent, aujourd’hui, de plus belle, par des scandales financiers connus des Sénégalais, des arrestations et des détentions arbitraires y compris parmi les journalistes, inspirées sinon organisées par le pouvoir politique au sommet de l’Etat. Le favoritisme, le clientélisme, les attitudes de parti pris, le manque de transparence, sont devenus monnaie courante dans notre pays, jusqu’à la gestion unilatérale et monopolistique du dossier des élections, où le pouvoir en place se taille toujours la part du lion, en ignorant les droits de tous les autres. L’accaparement des médias publics relève du même mal-vivre que subissent les citoyens, par un matraquage médiatique de tous les jours qui les désinforme et les déstabilise, tout à la fois, alors que la misère s’accroît, alors que les denrées de première nécessité deviennent inaccessibles alors que les pénuries de gaz et de carburant se répètent et se prolongent, alors que l’école sénégalaise est paralysée par les grèves et que le train de vie de l’Etat se déroule sous nos yeux, dans une intolérable ostentation et sans limite.

Les journalistes sénégalais, qui ont joué un rôle décisif dans la proclamation rapide et vraie des résultats du scrutin du 19 mars 2000 et qui ont ainsi contribué à sauver la démocratie sénégalaise, à cette occasion, sont aujourd’hui harcelés, malmenés, menacés de mort ou de molestation.

La jeunesse sénégalaise, qui s’était mobilisée pour conduire à la victoire de l’alternance en 2000, prend, présentement, la direction de l’Espagne, dans des pirogues de fortune, sans sécurité, au milieu de la nuit, pour échapper aux contrôles de la police des frontières, parce que cette jeunesse a perdu ses repères face à un régime qui a décidé de tourner le dos à toutes les promesses faites par le président Abdoulaye Wade lui-même, avant son élection. Une bonne partie de ces jeunes a sombré au fond de l’océan et des corps sans vie continuent d’être rejetés par la mer sur les côtes mauritaniennes, brésiliennes et même vers les Caraïbes, jusqu’à l’Ile de la Barbade.

Le Fonds National de Promotion de la Jeunesse a fourni la preuve de ce que le régime de M. Abdoulaye Wade ne peut réaliser aucun projet qui soit exploité et mis à la disposition des Sénégalais, de manière équitable, juste et transparente. C’est ainsi que ce Fonds traîne un déficit profond de plusieurs milliards de francs cfa qui sont le fruit de nombreux dysfonctionnements relevés, en grande partie, chez les mutuelles. Le cahier de charges de ce Fonds n’a pas été respecté et ses critères de sélection des bénéficiaires des prêts et des financements de projets ont été élaborés sur des bases discriminatoires privilégiant l’appartenance des jeunes promus au parti de M. Abdoulaye Wade lui-même.

Au niveau des femmes, c’est la catastrophe également. Leur situation ne s’est guère améliorée. A peine 5 % des crédits classiques annuels leur ont été accordés pour leurs activités de tontines (caisses de micro-crédit alternatif), de coopératives agricoles et autres. Dans d’autres régions du pays, le financement de leur fonctionnement est tout simplement inexistant.

Le bilan de notre passage au Gouvernement est acceptable. Pendant onze mois, temps assez court, du reste, nous avons, avec le Chef de l’Etat, équilibré la campagne de commercialisation des arachides, finalisé la création, avec le Maroc, de la Compagnie Air Sénégal International, bouclé le financement de la route Diamniadio – Kaolack, avec l’Union Européenne et la BOAD. Les difficultés macro-économiques pouvaient être résorbées par mon successeur à la primature afin que le Gouvernement de coalition puisse réaliser les réformes nécessaires. Mais la politique politicienne a pris le dessus.

4. Sur le plan international, les libéraux ont commis d’énormes aberrations diplomatiques avec la rupture brutale des relations entre le Sénégal et Taiwan, relations vieilles de plus d’une décennie qui avaient permis l’équipement de votre pays dans beaucoup de domaines. Une telle décision est-elle une bonne chose pour le Sénégal ?

La Chine continentale constitue, depuis des milliers d’années, un cadre de culture et de civilisation lié à l’évolution historique du monde. Depuis les anciennes dynasties et la construction de la Grande Muraille de Chine, ce pays a suivi une évolution qui ne peut être ignorée des autres puissances du monde. C’est en 1949 que la République de Chine, appelée Formose, puis Taiwan, a vu le jour lorsque le Général Tchang Kaï Chek s’est installé sur cette île pour y fonder un Etat. Beaucoup de pays, aujourd’hui, entretiennent des relations politiques et diplomatiques officielles avec Pékin, en ayant des Bureaux économiques à Taipeh. Nombreux sont ces pays, parmi lesquels figurent de grandes puissances occidentales.

Qu’est-ce qui empêcherait le Sénégal de s’orienter vers une pareille formule, en entretenant avec Pékin le même type de relation que ces grandes puissances, sans ignorer vingt et un millions de Taiwanais qui vivent dans l’Ile ? Qu’est-ce qui dit qu’un jour les deux entités ne se retrouveront pas, la main dans la main, sur la base historique de leur culture commune ?

Ce qu’il faut condamner dans la rupture des relations entre Taiwan et le Sénégal, c’est la manière utilisée car et surtout en diplomatie, la courtoisie et la sérénité sont de rigueur jusque dans les moments d’adversité les plus durs. La désinvolture qui a marqué la décision unilatérale prise par Dakar de rompre ses relations avec Taïwan pouvait être évitée. La reconnaissance doit aussi exister dans les relations entre Etats. Cela étant, la Chine de Pékin est un partenaire de première qualité pour un pays comme le Sénégal. Et ce pays est membre permanent du Conseil de Sécurité. Il figure comme un producteur de biens industriels et il sera bientôt un pourvoyeur de technologies. C’est une puissance nucléaire. Sa démographie en fait un marché important dans de nombreux domaines. Le Sénégal a donc raison de renouer avec Pékin.

5. Sont-ce tous ces échecs des libéraux qui vous ont obligé à démissionner de votre charge de Premier Ministre?

Je n’ai pas démissionné de ma charge de Premier ministre. Parce que je respecte le peuple sénégalais et parce que je dois, à l’égard de ce peuple, toujours poser des actes responsables et utiles. C’est pourquoi, je n’ai jamais envisagé de claquer la porte de la primature, au moment où de grandes urgences nous appelaient pour changer notre pays et l’engager, avec lucidité, dans la voie du développement. Je pensais pouvoir convaincre le Chef de l’Etat d’ajuster son mode de gouvernance publique. Mais il s’est entêté. Dès lors, il m’était devenu impossible de continuer de collaborer avec lui, à cause, principalement, de sa tendance trop personnelle à décider de tout et tout seul, sans consulter personne, sans utiliser une grille d’analyse fondée sur le sentiment de l’intérêt général. Il suit ses propres réflexes et agit par intuition. Lorsqu’il s’agit d’un individu, les erreurs qu’il commet ne concernent que sa personne, sa famille, son entourage. Mais quand il s’agit de tout un peuple, les dégâts sont pernicieux, profonds, souvent non réparables, et préjudiciables à tout un pays. Nous nous sommes séparés dans le calme.

Depuis mars 2001, il a souhaité, plusieurs fois, que l’Alliance des Forces de Progrès, notre parti et moi-même, retournions travailler avec lui. Nous lui avons, chaque fois, opposé un refus courtois mais ferme. La dernière tentative, à cet égard, remonte au 8 novembre 2006, sans succès, malgré les affabulations et les montages verbaux qui ont été agités, au lendemain de notre dernière rencontre, par certains, dans sa proximité, sur des bases purement mensongères et sans aucun lien avec la réalité des faits. Tout cela est vain. Le service du peuple requiert rigueur, persévérance et patience, au-delà du patriotisme et de l’esprit de sacrifice.

6. Il y a quelques semaines, le gouvernement a enclenché le processus électoral dans la controverse. Les conditions de ce processus garantissent-elles de réelles élections libres et transparentes ?

A l’étape actuelle du processus électoral au Sénégal, tous les actes posés par le pouvoir en place, indiquent que ce processus ne revêt aucune transparence. Depuis les inscriptions sur les listes électorales jusqu’à la distribution des cartes d’électeurs, les citoyens sénégalais ont noté, faits et preuves à l’appui, que le régime de Maître Wade a tout entrepris pour fausser, à tous les niveaux, les élections de 2007.

L’augmentation des salaires et des indemnités des fonctionnaires de l’Administration territoriale (Gouverneurs, Préfets et sous-Préfets), parfois par un doublement des montants versés, ne vise qu’un objectif : obtenir une complicité active dans le déroulement des opérations, dans la gestion des urnes, dans la comptabilité des votes et dans l’établissement de certains papiers concernant le décompte des voix. Il a fait de même pour les policiers, le magistrats et autres corps de fonctionnaires, de manière sélective. Evidemment, tous les fonctionnaires de l’Administration ne sont pas des corrompus. Mais le risque demeure. Ensuite, le Chef de l’Etat refuse de rendre publique la carte électorale, c’est-à-dire le nombre et l’implantation des bureaux de vote, pour pouvoir créer des bureaux fictifs.

7. Quelles sont les exigences de l’AFP à propos de ce processus électoral ?

En démocratie, la revendication la plus naturelle en matière d’élections concerne trois principes qui portent sur les concepts de transparence, de régularité et de contrôle contradictoire et public du résultat des urnes. Sans que l’Administration ou le pouvoir politique puissent s’octroyer des privilèges susceptibles de leur faciliter un détournement du vote des électeurs ou la falsification des résultats des bureaux de vote. Le régime du président Wade compte sur de telles pratiques. Ce qu’attend notre parti, c’est le libre accès de tous les électeurs aux bureaux de vote, l’absence de toute tentative d’influencer les électeurs ou de les soumettre à des menaces, le respect de la loi électorale et la publication immédiate des résultats, de manière à les rendre infalsifiables entre les lieux de vote et Dakar. En résumé, nous exigeons que la loi soit respectée dans toutes ses dispositions et que le peuple souverain ait le dernier mot dans le choix de ceux et de celles qui vont conduire son destin.

8. En dehors de ces médias d’Etat, d’autres institutions de la République sont devenues des instruments du parti au pouvoir. La Direction des Investigations Criminelles (DIC), par exemple, est devenue, sous les libéraux, une sorte de CIA sénégalaise dont les fonctionnaires pour garder leur place et faire allégeance au président Wade, se livrent comme leurs collègues américains à des faux et usages de faux pour incriminer les adversaires politiques du pouvoir…

Vous savez qu’un peuple ou une société humaine entrent en décadence lorsqu’ils commencent à tourner le dos aux valeurs qui devraient faire leur propre grandeur. L’esprit de solidarité, le souci de vérité, la générosité dans les relations sociales, l’honnêteté dans la pensée et dans l’action, le souvenir glorieux du passé, le sens de l’amitié et la fidélité aux principes, constituent la base de ces valeurs sans lesquelles les hommes deviennent des animaux. Il n’y a que le pouvoir de Dieu qui est éternel et tout autre pouvoir est destiné à prendre fin et à se perdre dans les méandres de l’histoire. Tout dirigeant politique doit se soucier, après sa disparition, de laisser le souvenir, aux générations qui viennent après lui, de l’attachement qu’il a eu à l’endroit de ces valeurs qui, seules, confèrent à l’individu une existence après la mort au sein des sociétés qui continuent de cultiver sa mémoire et de formuler en sa faveur des prières. Les gangsters et les dictateurs disparaissent à jamais dans l’esprit des hommes, lorsqu’ils perdent leur pouvoir de violence ou de destruction et ils sont assimilés à Cheytan, le diable apocalyptique. Ils sont maudits chaque fois que l’esprit humain pense à la vie qu’ils ont vécue sur terre. Ce sont ces données là que traduisent, aujourd’hui et au Sénégal, les comportements de certains décideurs politiques qui vivent du sang des citoyens, lorsqu’ils ne manquent de rien quand le peuple manque de tout. Mais, tôt ou tard, le changement arrivera, car seul Dieu est en dehors du temps.

9. L’augmentation du nombre de députés et la création de nouvelles circonscriptions électorales sont perçues par certaines formations comme un tripatouillage constitutionnel du gouvernement. Quelle est la position de l’AFP sur cette problématique ?

Augmenter le nombre des députés de 120 à 150 ne changera rien à la situation de pauvreté des Sénégalais, aux délestages que la compagnie nationale d’électricité impose aux familles, aux hôpitaux, aux écoles, aux entreprises, aux églises et aux mosquées, plusieurs fois par jour. Sans que, pourtant, les factures d’électricité baissent. Bien au contraire, les augmentations du prix de l’électricité se répètent, sans aucune annonce officielle, presque dans la clandestinité, frappant jusque dans les ménages les plus démunis.

Au surplus, augmenter le nombre de députés ne peut améliorer pas la situation des travailleurs, dans les villes comme dans les zones rurales. Bien au contraire, la cherté des produits alimentaires, l’augmentation du prix du transport, l’augmentation des prix du carburant, le coût progressif des fournitures scolaires, grève le budget des familles et réduit le nombre de repas de trois à un, chaque jour. Evidemment, le président de la République, lui, ne subit aucun de ces maux et il voyage beaucoup, par ci par là. C’est facile, mais sans aucune utilité pour le peuple. Au fond, le régime actuel rêve, sans doute, du retour à l’Assemblée Nationale d’une majorité mécanique progouvernementale dont le seul rôle sera de voter « toutes lois » commanditées par le régime.

10. Pourriez-vous nous donner quelques grandes lignes de votre projet de société pour le Sénégal des cinq prochaines années ?

Je ne peux rien vous dire actuellement, sans les décisions des instances de mon parti et de nos partenaires de la coalition pour l’autre alternance. Nous voulons offrir une ère nouvelle de bien-être à nos concitoyens.

11. Deux élections seront suives de très près en Afrique en 2007 : les présidentielles nigérianes et sénégalaises. Mais c’est celle du Sénégal qui inquiète le plus la communauté internationale. Le président Wade avait pour son meeting politique du 11 novembre 2006 à Thiès, conforté des rapports confidentiels des renseignements généraux occidentaux sur la politisation excessive des milices islamiques d’obédience mouride dont certaines avaient des relations insoupçonnées avec le wahhabisme saoudien (islamisme radical). En tant que membre du High Level Group de la Commission de l’Alliance pour le Dialogue des Peuples de l’ONU, et leader politique sénégalais, quelle garantie donnez-vous à l’opinion internationale qui redoute une probable talibanisation du Sénégal ?

Le régime en place au Sénégal a administré la preuve de son option sans équivoque en faveur de tous moyens susceptibles de l’aider à demeurer au sommet de l’Etat, sans aucune référence à la morale républicaine. Le parti du président Wade a toujours entretenu des milices, en toutes occasions, pendant qu’il était dans l’opposition. De nombreux éléments ont été transférés depuis ces milices dans des structures officielles de police ou de sécurité, avec des grades élevés, sans aucune formation préalable et sans avoir suivi les filières par lesquelles sont passés les Sénégalais qui se sont engagés, selon des procédures normales, pour faire carrière dans ces structures.

Alors, pendant que les milices du président Wade continuent d’être actives, dans et en dehors des circuits officiels, d’autres franges ont pensé, à tort, qu’elles pouvaient aussi organiser leurs propres milices. Lorsque celles-ci s’habillent d’une teinte religieuse, personne ne sait où peut mener une telle pratique. En l’état actuel des choses, il ne semble pas que le président Wade, qui utilise ces groupes, ait l’intention de faire en sorte que la loi et la sécurité des citoyens au Sénégal soient respectées. Au départ du régime actuel, nous réorganiserons ce secteur. La loi et l’ordre reviendront.

Nous entendons, pour ce qui nous concerne, demeurer mobilisés au service des acquis de la démocratie sénégalaise. Pour que le peuple soit placé dans des conditions favorables à un développement concerté, utiles à tous. La solution de la crise casamançaise relève de ce domaine. Ce dossier ne prendra fin qu’à l’issue de négociations menées avec sérieux et avec une volonté inébranlable de ramener la paix dans le sud de notre pays. Dans tous les cas, la lutte contre le terrorisme et la violence est un impératif de sécurité et de paix. Notre engagement sur le sujet est clair.

12. Le leader des libéraux qui est le troisième doyen des Chefs d’Etat de la planète après Fidel Castro de Cuba et Robert Gabriel Mugabé du Zimbabwé, doit-il se succéder à lui-même ?

Ma culture de Croyant - et de ce point de vue là les Musulmans et les Chrétiens se retrouvent - ne me permet pas de me réjouir de l’état de santé d’un autre être humain. Si le président Wade connaît des ennuis d’ordre médical, je prie le Seigneur de lui redonner la santé. Par ailleurs, je me suis toujours interdit toute attaque personnelle contre le président Abdoulaye Wade ou contre sa famille. Je m’oppose à sa politique et à sa manière de gouverner le Sénégal, à l’opposé de ce qu’il avait promis. Il devrait, il aurait dû s’inspirer de la leçon de sagesse donnée à l’Afrique et au monde par Madiba, le Président Nelson Mandela. Nelson Mandela demeurera, pour toujours, un exemple et une référence dans l’ordre de grandeur des grands hommes de ce monde, pour avoir su ce qu’est le sens du pardon et la capacité d’oublier lorsque l’oubli libère l’individu de tout esprit de rancune ou de revanche. Nelson Mandela a quitté le pouvoir, en sage de l’Afrique, sachant que c’est par les actes qu’il pose que l’homme se distingue dans une société, comme un soleil qui brille de mille feux au firmament des vertus qui perpétuent l’histoire de l’humanité, dans son éternité et dans son universalité infinie. Le président Abdoulaye Wade est-il capable d’avoir de tels comportements, de s’élever à ce niveau, de s’inscrire dans la durée des références imprescriptibles dans la lignée des guides qui font l’histoire des peuples? La question reste posée. La réponse dépend de lui.

Propos recueillis par Koffi Sylvain Sasse